Dans un mouvement diplomatique qui pourrait redéfinir les équilibres régionaux, la République Démocratique du Congo a placé Kigali devant ses responsabilités : aucun accord économique ne sera paraphé tant que les troupes rwandaises continueront d’opérer dans l’Est congolais aux côtés des rebelles du M23. Cette position, martelée par Patrick Muyaya, ministre de l’Information et porte-parole du gouvernement, lors d’un briefing médiatique ce 8 octobre 2025, constitue un véritable ultimatum stratégique.
Le refus de Kinshasa de signer le Cadre d’intégration économique régionale à Washington représente-t-il un tournant dans la gestion du conflit qui ensanglante l’Est de la RDC depuis des années ? La réponse du gouvernement congolais semble sans équivoque : la paix précède l’économie, et non l’inverse. « On ne pourra parler de paix, d’économie ou d’intégration que lorsque la paix sera restaurée », a rappelé Patrick Muyaya, citant le président Félix Tshisekedi. Une déclaration qui sonne comme un rappel à l’ordre pour tous ceux qui croyaient possible de dissocier coopération économique et résolution des conflits.
La conditionnalité ainsi établie par Kinshasa révèle une nouvelle approche dans les relations RDC-Rwanda, où les considérations sécuritaires priment désormais sur les opportunités économiques. Le massacre de civils à Rutshuru en juillet, avec son caractère ethnique marqué, sert de tragique illustration aux arguments congolais. Comment envisager des partenariats économiques durables dans un environnement où les populations civiles restent la cible d’atrocités ?
Cette posture ferme du gouvernement congolais s’inscrit dans une logique de cohérence diplomatique assumée. Les cadres économiques régionaux, aussi prometteurs soient-ils, ne sauraient prospérer sur des terres instables où des forces étrangères opèrent en violation de la souveraineté nationale. Le retrait des troupes rwandaises devient ainsi le préalable absolu à toute normalisation des relations entre les deux pays.
La stratégie de Kinshasa, en liant explicitement la signature d’accords économiques au retrait des troupes rwandaises, place la balle dans le camp de Kigali. Jusqu’où le Rwanda est-il prêt à aller pour préserver ses intérêts économiques dans la région ? La réponse à cette question déterminera l’avenir des relations entre les deux nations et, plus largement, la stabilité de toute la région des Grands Lacs.
Le conflit dans l’Est de la RDC continue de représenter un défi majeur pour la sécurité régionale, et la position inflexible de Kinshasa pourrait bien constituer un test décisif pour la communauté internationale. Les prochains mois révèleront si cette approche aboutira à une désescalade ou si elle accentuera les tensions dans une région déjà fortement fragilisée.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net