La situation humanitaire atteint un point critique à Lubero-centre, dans le territoire de Lubero au Nord-Kivu. Trois déplacés internes ont perdu la vie le mois dernier, succombant à la faim et à l’impossibilité d’accéder aux soins médicaux essentiels. Cette information tragique a été officiellement confirmée ce mardi 7 octobre par les autorités locales et la responsable du site d’hébergement.
Le site, situé autour du bureau du territoire, abrite des centaines de ménages déplacés qui survivent dans des conditions extrêmement précaires. Comment une telle tragédie a-t-elle pu se produire en plein cœur du territoire ? La réponse réside dans l’enchaînement infernal de l’insécurité et de l’isolement humanitaire.
Charline Katungu Tamwenya, responsable du site, révèle que les trois victimes étaient toutes des adultes chefs de famille. Leur disparition laisse derrière elles plus de cinq orphelins de moins de 18 ans, plongés brutalement dans le deuil et la précarité. « Plusieurs meurent de famine », affirme-t-elle avec une gravité qui traduit l’ampleur du drame.
La spirale infernale de la précarité s’accélère : « Certains ont peur d’aller à l’hôpital par manque de moyens financiers. Avec des factures de 70 à 75 dollars, comment un déplacé peut-il se soigner alors qu’il peine déjà à se nourrir ? » Cette question rhétorique résume l’impasse dans laquelle se trouvent des milliers de personnes déplacées.
L’absence totale d’aide humanitaire depuis trois mois aggrave considérablement la crise. Les organisations humanitaires rencontrent des obstacles insurmontables pour accéder à la zone, paralysées par l’insécurité persistante. L’activisme des rebelles ADF dans la région crée un environnement trop dangereux pour les interventions humanitaires conventionnelles.
Le colonel Alain Kiwewa, administrateur du territoire de Lubero, ne cache pas son alarmisme face à cette situation dramatique. « La situation est dramatique », confirme-t-il, avant de lancer un appel pressant aux acteurs humanitaires : « Nous demandons une intervention urgente pour sauver des vies ».
Cette tragédie met en lumière la vulnérabilité extrême des déplacés internes dans les zones de conflit du Nord-Kivu. L’insécurité persistante empêche non seulement l’acheminement régulier de l’aide humanitaire, mais elle aggrave également les conditions de vie déjà précaires des populations civiles. Comment en est-on arrivé à cette situation de famine et de désespoir ?
La crise humanitaire à Lubero-centre illustre parfaitement le cercle vicieux qui caractérise de nombreuses zones de conflit en République Démocratique du Congo. L’insécurité génère des déplacements massifs de populations, qui deviennent alors dépendantes de l’aide humanitaire. Lorsque cette aide ne peut plus parvenir aux bénéficiaires en raison de cette même insécurité, la catastrophe humanitaire devient inévitable.
Les déplacés internes de Lubero font face à un dilemme insoluble : rester sur place et affronter la famine et la maladie, ou tenter de fuir vers d’autres zones en bravant les dangers des routes contrôlées par les groupes armés. Dans les deux cas, leur survie reste incertaine.
La communauté humanitaire internationale se trouve elle-même confrontée à un défi majeur. Comment assurer la protection des civils et la distribution de l’aide dans un environnement aussi volatile ? Les solutions conventionnelles semblent inadaptées face à la complexité de la situation sécuritaire dans le Nord-Kivu.
L’urgence absolue exige des mesures exceptionnelles. La coordination entre les forces de sécurité, les autorités locales et les acteurs humanitaires doit être renforcée pour créer des couloirs humanitaires sécurisés. Sans une intervention rapide et coordonnée, combien d’autres vies seront sacrifiées sur l’autel de l’insécurité et de l’indifférence ?
La tragédie de Lubero-centre sonne comme un avertissement sévère. Elle rappelle que derrière les statistiques et les rapports humanitaires se cachent des vies humaines brisées, des familles disloquées, un avenir compromis. Les trois décès enregistrés le mois dernier ne sont probablement que la partie visible d’une crise humanitaire bien plus profonde.
La réponse à cette urgence nécessite une mobilisation immédiate et substantielle. L’accès humanitaire doit être restauré, les soins médicaux doivent être rendus accessibles, et la sécurité alimentaire doit être garantie. Le temps presse, et chaque jour perdu se mesure en vies humaines.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net