La cité de Bokoro, territoire de Kutu dans la province du Maï-Ndombe, vit des heures sombres ce lundi 6 octobre. Une simple dispute conjugale a dégénéré en affrontement meurtrier entre communautés pygmée et bantoue, plongeant la région dans la terreur. Comment une affaire privée a-t-elle pu embraser toute une communauté ?
« J’ai vu l’homme pygmée courir avec son arc, puis les cris ont commencé à retentir », témoigne un habitant sous couvert d’anonymat. « En moins d’une heure, toute la cité était en ébullition. Les Bantous cherchaient vengeance, les Pygmées fuyaient vers la forêt. »
Le drame trouve son origine dans une scène de jalousie : un homme pygmée surprisant son épouse en flagrant délit d’adultère avec un Bantou. La flèche mortelle qui s’en est suivie a déclenché un cycle de violences dont les conséquences dépassent largement le cadre initial. Deux vies perdues, des familles déchirées, une communauté entière traumatisée.
« Nous devons nous rendre sur place pour les ramener et amorcer le processus de réconciliation entre les deux communautés », insiste le gouverneur Nkoso Kevani, visiblement préoccupé par l’escalade des violences. Son appel à la cohésion sociale résonne comme un vœu pieux face à l’ampleur des dégâts.
Sur le terrain, le bilan est lourd. Outre les deux décès, une femme pygmée enceinte se trouve dans un état critique. Plusieurs habitations ont été réduites en cendres, transformant des vies en cendres. « Aucun Pygmée n’ose circuler librement », confirme une source locale. « La peur est palpable, les enfants errent sans repères. »
Ce conflit pygmée-bantou à Bokoro interroge profondément sur la fragilité du vivre-ensemble dans la région. Derrière l’étincelle de l’adultère se cachent des tensions historiques, des frustrations accumulées, des rapports de domination qui ressurgissent au premier prétexte. La forêt, traditionnellement lieu de refuge des peuples autochtones, redevient aujourd’hui leur seul sanctuaire.
Les éléments de police dépêchés sur place pourront-ils rétablir une paix durable ? La réconciliation est-elle encore possible quand la méfiance a remplacé la confiance ? Les blessures de cette journée risquent de marquer longtemps les mémoires, creusant un peu plus le fossé entre deux communautés qui devraient pourtant composer ensemble l’avenir du Maï-Ndombe.
Alors que le gouverneur promet une médiation, les habitants de Bokoro retiennent leur souffle. Entre les cendres des maisons détruites et l’absence des Pygmées réfugiés en forêt, c’est toute une partie de l’âme de la cité qui semble avoir disparu. Le chemin vers la réconciliation s’annonce long, semé d’embûches, mais indispensable pour éviter que de nouvelles violences ne viennent endeuiller à nouveau le territoire de Kutu.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd