Le silence est parfois plus assourdissant que les cris. Dans l’est de la République Démocratique du Congo, région déchirée par des décennies de conflits, une femme de 45 ans nous confie, la voix brisée : « Ils m’ont violée devant mes enfants. Maintenant, mon mari m’a rejetée et je dois élever seule mes cinq enfants. » Son témoignage reflète la réalité brutale de milliers de Congolaises, une réalité que la duchesse Sophie de Cornouailles est venue constater de ses propres yeux.
Comment rester insensible face à cette tragédie humaine qui se déroule dans l’indifférence quasi générale ? La visite de la duchesse Sophie dans les zones conflictuelles du Nord-Kivu, particulièrement à Beni, soulève des questions fondamentales sur notre humanité collective. Accompagnée de professionnels de santé dévoués, elle a pu mesurer l’ampleur des dégâts causés par les violences sexuelles utilisées comme armes de guerre.
Le Dr Denis Mukwege, prix Nobel de la paix 2018, ne cesse d’alerter la communauté internationale : « Ce qui se passe ici est un féminicide à grande échelle. » À la clinique Panzi de Kinshasa, où la duchesse a assisté à une opération sur une fillette de cinq ans victime de violences sexuelles, l’atmosphère est lourde de souffrance mais aussi d’espoir. Les mains expertes des chirurgiens réparent les corps mutilés, mais comment panser les âmes meurtries ?
Les survivantes rencontrées par la duchesse Sophie partagent des histoires qui glacent le sang. Des adolescentes violées par des forces censées les protéger, des femmes contraintes à des avortements forcés, des familles entières détruites par la stigmatisation. Pourtant, derrière chaque récit de douleur émerge une incroyable résilience. « Je veux devenir médecin pour aider celles qui ont souffert comme moi », murmure une jeune fille de 16 ans, son regard déterminé contrastant avec son corps fragile.
La situation à Beni et dans les territoires voisins représente une crise humanitaire aux proportions catastrophiques. Avec plus de sept millions de personnes déplacées et des centaines de nouveaux cas de violences sexuelles rapportés chaque mois, l’urgence est absolue. Les groupes armés, dont le tristement célèbre M23, continuent leurs exactions en toute impunité, profitant de l’instabilité chronique de la région.
Mais au-delà des chiffres et des constats accablants, que peut réellement changer une visite protocolaire ? La présence de personnalités internationales comme la duchesse Sophie permet de braquer les projecteurs sur une crise souvent oubliée. Cependant, les survivantes attendent plus que de la sympathie. Elles réclament justice, réparation et surtout, des perspectives d’avenir. Comme le souligne une travailleuse sociale de Goma : « Ces femmes n’ont pas besoin de pitié, mais de moyens concrets pour reconstruire leur vie. »
L’appel lancé par la duchesse Sophie à la résidence de l’ambassade britannique résonne comme un cri d’alarme : ne pas détourner le regard. Pourtant, la route vers la guérison collective semble semée d’embûches. L’accès aux soins reste limité, l’impunité des bourreaux quasi-totale, et les ressources allouées à la prise en charge des victimes insuffisantes face à l’ampleur des besoins.
La rencontre entre la duchesse et le président Félix Tshisekedi a permis de remettre la question des violences sexuelles au cœur des priorités nationales. Reste à savoir si les engagements pris se traduiront par des actions tangibles sur le terrain. Les survivantes, elles, n’ont plus le luxe d’attendre. Leur combat quotidien pour la dignité et la reconnaissance continue, avec ou sans attention internationale.
Alors que la duchesse Sophie repart vers l’Europe, les femmes de l’est de la RDC poursuivent leur marche courageuse vers la reconstruction. Leur résistance silencieuse interpelle notre conscience collective : jusqu’à quand tolérerons-nous que l’horreur devienne banale ? La réponse à cette question déterminera non seulement l’avenir du Congo, mais aussi celui de notre humanité commune.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: https://www.thetimes.co.uk/article/sophie-duchess-congo-rape-victims-fj7s0vm3q?utm_source=chatgpt.com
