Dans les collines verdoyantes de Matanda, au territoire de Masisi, un souffle d’espoir renaît parmi les femmes qui ont tout perdu. Comment reconstruire sa vie lorsque les conflits vous ont tout pris ? Pour 1 205 femmes et filles retournées, la réponse se trouve dans un programme innovant d’assistance financière directe qui transforme leur quotidien et redéfinit leur avenir.
« Avant, nous survivions. Aujourd’hui, nous recommençons à vivre », confie Jeanne, mère de quatre enfants, les mains encore marquées par les travaux des champs. Son témoignage résonne comme un écho parmi des centaines d’autres femmes qui, grâce aux 350 dollars reçus, ont pu relancer des activités génératrices de revenus. « Cet argent, ce n’est pas une aumône. C’est un outil pour reprendre notre place dans la société ».
Le mécanisme des Associations villageoises d’épargne et de Crédit (AVEC) Matanda constitue le cœur battant de cette initiative. Ces groupements solidaires permettent aux femmes de mutualiser leurs ressources, de s’octroyer des crédits et de développer collectivement des projets économiques. Une approche qui rompt avec les schémas d’assistance traditionnels en donnant aux bénéficiaires le pouvoir de décider elles-mêmes de l’utilisation des fonds.
« Le cash offre plus de liberté et de responsabilité », explique un responsable du projet. « Ces femmes investissent selon leurs besoins réels et les activités adaptées à leur communauté. Certaines choisissent le commerce de produits agricoles, d’autres l’élevage de petits ruminants, d’autres encore la transformation de produits locaux. Cette diversité renforce la résilience de l’ensemble du village ».
L’impact de ce programme d’autonomisation des femmes du Nord-Kivu dépasse largement la simple dimension économique. Dans une région meurtrie par des années de conflits, où les femmes ont souvent payé le plus lourd tribut, cette initiative représente un vecteur de cohésion sociale et de reconstruction communautaire. Comment mesurer la valeur d’une femme qui retrouve sa dignité ? Comment quantifier l’espoir qui renaît dans le regard d’une mère capable de nourrir ses enfants ?
Le projet, mis en œuvre par l’ONG COPADEC avec l’appui technique et financier du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), démontre qu’une assistance financière directe bien structurée peut catalyser des changements durables. Loin des approches descendantes, ce modèle place les femmes au centre du processus de développement, reconnaissant leur rôle crucial dans la stabilisation et la reconstruction des communautés affectées par les crises.
Sur le terrain, les résultats parlent d’eux-mêmes. Des étals de marché qui renaissent, des champs qui retrouvent leur fertilité, des sourires qui remplacent la résignation. « Nous ne voulons plus dépendre de qui que ce soit », affirme une jeune bénéficiaire. « Nous voulons être actrices de notre développement, participer aux décisions qui concernent notre communauté ».
Cette expérience pilote à Matanda ouvre des perspectives encourageantes pour l’ensemble de la province du Nord-Kivu. Elle prouve que l’autonomisation économique des femmes retournées constitue un levier puissant pour consolider la paix et jeter les bases d’un développement inclusif. Dans un contexte où les défis humanitaires restent immenses, cette approche innovante d’assistance financière directe pourrait inspirer d’autres interventions dans la région.
Alors que le soleil se couche sur les collines de Masisi, les femmes des AVEC continuent de tisser patiemment les fils de leur renaissance. Leur combat quotidien pour reconstruire leurs vies et celles de leurs familles nous rappelle une vérité essentielle : le développement durable ne se décrète pas, il se construit avec celles et ceux qui en sont les premiers artisans.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net