Dans une décision administrative pour le moins surprenante, les responsables de la rébellion M23-AFC imposent désormais aux populations du territoire de Walungu, au Sud-Kivu, une centralisation forcée de l’enregistrement des mariages civils. Cette mesure, perçue comme une entrave aux droits fondamentaux des citoyens, oblige tous les couples à se rendre exclusivement au chef-lieu du territoire pour officialiser leur union, excluant ainsi les entités coutumières et les postes de groupement de ce processus essentiel.
Comment une telle décision peut-elle être justifiée dans des zones souvent enclavées, où les déplacements représentent un défi logistique et financier majeur pour les populations locales ? La députée provinciale Béatrice Nanvano dénonce avec véhémence ce qu’elle qualifie de « mesure aux motivations financières occultes », soulignant que cette décision « ignore même le pouvoir coutumier qui permettait à de nombreux couples de vivre légalement leur union ».
Au-delà des simples considérations pratiques, cette imposition soulève des questions fondamentales sur l’accès équitable aux services publics dans les régions en proie à l’instabilité. La centralisation administrative forcée par un groupe rebelle contrevient frontalement aux principes de décentralisation prônés par les institutions congolaises. Les officiers de l’état civil, normalement représentés par les bourgmestres, maires et administrateurs de territoire assistés de commis désignés, se voient ainsi dépossédés de leurs prérogatives légales.
Cette situation met en lumière les défis persistants auxquels font face les populations de l’Est de la République démocratique du Congo, prises entre les revendications conflictuelles des groupes armés et les carences de l’État central. La députée Nanvano interpelle directement les autorités de Kinshasa : « Nous demandons aux autorités de vouloir sauver cette population dans la guerre. La population souffre. Nous vivons de la misère dans l’Est de la RDC ».
Cette mesure du M23 concernant les mariages civils à Walungu s’inscrit dans un contexte plus large de contestation de la légitimité étatique et de remise en cause des structures administratives établies. Elle pose également la question du respect des droits civils dans les zones sous contrôle rebelle, où l’accès aux services de base devient progressivement un instrument de domination plutôt qu’un droit citoyen.
Alors que les conflits dans l’Est de la RDC continuent de faire des victimes collatérales parmi les populations civiles, cette décision administrative pourrait bien représenter un précédent dangereux dans la manière dont les groupes armés instrumentalisent l’appareil administratif à des fins de contrôle territorial. La communauté nationale et internationale se doit de rester vigilante face à ces atteintes subtiles mais profondes à la souveraineté de l’État congolais et aux droits fondamentaux de ses citoyens.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net