Entre lumière argentique et pixels numériques, un siècle de regards congolais s’est écrit sur la pellicule de l’histoire. Ce 19 août 2025, la République Démocratique du Congo célèbre avec émotion et fierté cent ans de photographie congolaise, marquant ainsi une reconquête symbolique de l’image nationale par ceux qui en sont les véritables dépositaires.
Comment une nation peut-elle renaître à travers l’objectif de ses propres enfants ? La réponse se dessine dans ce parcours centenaire qui transforme l’image subie en image choisie, le stéréotype colonial en narration authentique. Baudouin Bikoko, griot moderne de la photographie congolaise, souligne avec justesse que les premiers clichés du Congo portaient souvent le sceau d’un regard extérieur, déformant la réalité et niant la dignité des peuples photographiés.
Mais depuis 1925, une révolution silencieuse s’opère. L’image devient acte volontaire, affirmation identitaire, miroir tendu vers une société en pleine mutation. Les photographes congolais, ces archéologues de l’instant, ont progressivement repris la main pour offrir au monde une vision plurielle et représentative de leur réalité. Leurs clichés racontent désormais des histoires vécues, des mémoires collectives, une esthétique propre qui pulse au rythme des aspirations d’un peuple.
Le centenaire de la photographie congolaise s’est illustré par des initiatives remarquables. La présentation du livre Photo comme écriture de Baudouin Bikoko retrace avec profondeur les enjeux identitaires de cette pratique artistique. L’initiative Solola Foto 2024, orchestrée par Anastasie Langu, a transformé Instagram en galerie virtuelle, célébrant avec modernité les talents locaux. Des masterclasses, expositions et débats ont mis en lumière les nouveaux griots de l’image comme Moses Sawasawa, Stéphanie Bujiriri ou Pierrot Kekele.
La photographie congolaise contemporaine se situe à la croisée des chemins, documentant avec acuité les réalités sociales, les conflits, les traditions et les mutations urbaines. Elle tisse des ponts entre générations, entre mémoire et modernité, résistant à l’oubli dans un monde saturé d’images. Cette pratique artistique crée du lien, affirmant une narration propre dans le grand concert visuel mondial.
Ce centenaire dépasse la simple commémoration pour devenir une affirmation culturelle puissante. Il symbolise la reconquête du droit à l’autoreprésentation et invite à regarder autrement cette riche production visuelle. La photographie congolaise, dans toute sa diversité et sa complexité, continue d’écrire avec lumière l’histoire en mouvement d’une nation en perpétuelle renaissance.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net
