Dans une allocution marquante lors de sa prise de fonction, Sakombi Molendo, fraîchement installé à la tête du ministère des Ressources hydrauliques et Électricité, a planté le décor d’une bataille titanesque : celle de l’accès universel à l’eau et à l’électricité en République Démocratique du Congo. « L’électricité et l’eau potable ne sont pas des biens de luxe. Ce sont les moteurs de notre développement », a-t-il martelé, alignant son discours sur la priorité sociale du gouvernement Suminwa. Une déclaration qui sonne comme un aveu implicite de l’échec des décennies précédentes, tout en posant les jalons d’un mandat sous haute pression.
Le constat dressé par le ministre est sans appel : avec deux tiers de la population urbaine privée d’eau potable et un déficit énergétique criard de 2000 MW, la RDC reste paradoxalement assise sur un potentiel hydroélectrique colossal. Sakombi Molendo identifie ce gouffre comme « un obstacle majeur au développement économique », pointant du doigt l’urgence de moderniser des réseaux vétustes qui asphyxient l’industrie et le quotidien des Congolais. Mais comment transformer cette malédiction géographique en bénédiction économique ? La réponse du ministre s’articule autour d’une stratégie à deux vitesses combinant solutions d’urgence et vision à long terme.
« Nous devons absolument mobiliser les investissements pour augmenter notre capacité de production partout dans le pays. Qu’il s’agisse d’hydroélectricité, d’énergie solaire ou d’autres sources, chaque projet compte »
Parmi les chantiers prioritaires, le projet Inga 3 apparaît comme le Graal énergétique, qualifié par Sakombi Molendo de « porteur d’un immense espoir pour une énergie propre et abordable ». Cette relance, maintes fois annoncée mais perpétuellement différée, cristallise désormais l’ambition d’intégration régionale du gouvernement. Le ministre promet d’y accorder une « attention particulière », tout en diversifiant les sources d’énergies renouvelables au Congo. Les mini-réseaux solaires sont érigés en solution miracle pour électrifier les zones rurales isolées, loin des grands centres urbains.
La feuille de route dévoilée mise sur une réhabilitation express des infrastructures existantes – Grand Katende, Kakobola, Tshopo 2 et Ruzizi 3 figurant en tête de liste – doublée d’un appel massif au secteur privé. « Nous allons lancer de nouveaux chantiers en impliquant massivement le secteur privé », a précisé le ministre, conscient que les caisses de l’État ne suffiront pas à combler le retard accumulé. Cette ouverture cache-t-elle une privatisation rampante des secteurs stratégiques ? La gouvernance du secteur, promet Sakombi Molendo, sera assainie pour « attirer et sécuriser les investissements », avec une refonte législative incluant de nouvelles lois sur l’eau et l’électricité.
L’ombre des entreprises publiques défaillantes plane cependant sur ce plan ambitieux. La SNEL et la REGIDESO sont sommées de « se conformer aux réformes », tandis que le ministre annonce des concertations avec les opérateurs miniers, gros consommateurs d’énergie. Cette approche pragmatique viserait à résorber progressivement le déficit avant même la mise en service d’Inga 3. Mais le chemin reste semé d’embûches : comment concilier rentabilité économique et droit fondamental à l’eau et l’électricité ? Comment éviter que les énergies renouvelables au Congo ne bénéficient qu’aux industries extractives ?
En plaçant la barre si haut, Sakombi Molendo engage non seulement son ministère mais tout l’exécutif Suminwa dans un pari périlleux. La réussite de ce plan eau-électricité en RDC déterminera la crédibilité sociale du gouvernement, tandis que son échec risquerait d’enfoncer davantage le pays dans le cycle infernal des promesses non tenues. Les prochains mois, ponctués par la concrétisation des premiers « impacts visibles » promis, diront si cette déclaration de guerre énergétique relève du vœu pieux ou d’une véritable révolution des ressources hydrauliques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net