« On nous donne un peu d’argent et on nous dit de rentrer chez nous, mais nos maisons sont encore sous la boue », confie Marie, mère de trois enfants, en serrant l’enveloppe reçue au Stade des Martyrs. Comme des centaines de sinistrés des inondations Kinshasa, elle fait face à un retour angoissant après les pluies torrentielles rdc 2025 des 4 et 5 avril dernier. Sous la supervision du vice-Premier ministre Jacquemain Shabani, coordonnateur de la gestion des catastrophes, l’évacuation des sites d’hébergement temporaire a débuté dans une atmosphère tendue.
Cette opération matérialise les décisions de la 52ème réunion du Conseil des ministres, exigeant la fermeture des sites de Tata Raphael et de l’hôpital de Kinkole. Chaque famille reçoit une aide financière symbolique, première étape d’un retour domicile sinistrés complexe. Mais comment reconstruire quand tout a été englouti ? La question hante les bénéficiaires de cette aide gouvernementale catastrophes, alors que les stigmates des inondations restent visibles dans plusieurs quartiers.
Les pluies diluviennes d’avril 2025 ont transformé Kinshasa en paysage apocalyptique : près de quarante morts, une centaine de blessés, et des disparus dont on craint de retrouver les corps des semaines plus tard. À Ndanu, De Bonhomme ou Limete Salongo, des rues entières ressemblent encore à des lagunes fétides. La rivière Ndjili, sortie brutalement de son lit, a transformé le boulevard Lumumba en un fleuve impétueux, isolant le district de la Tshangu et bloquant l’accès à l’aéroport international de Ndjili pendant plusieurs jours.
Le gouvernement insiste sur un « retour sécurisé et une réinsertion durable », mais sur le terrain, les défis s’accumulent. Les sinistrés kinshasa évoquent des habitations structurellement endommagées, des risques sanitaires persistants et l’absence d’infrastructures drainantes. « L’argent reçu suffira-t-il à rebâtir ce que les eaux ont détruit ? », interroge un ancien résident de Limete, les pieds dans la boue séchée. Cette aide immédiate soulève des questions plus larges sur la préparation aux catastrophes dans une mégapole vulnérable.
Derrière l’urgence humanitaire se profile un enjeu sociétal majeur : l’urbanisation anarchique de Kinshasa aggrave systématiquement l’impact des intempéries. Les constructions précaires sur les berges de la Ndjili, le manque de canalisations efficaces et la déforestation accentuent chaque crue. Les sinistrés des inondations deviennent ainsi les symboles d’un mal urbain chronique. Leur retour forcé vers des zones inondables sans mesures préventives solides risque de préparer le terrain pour de nouvelles tragédies.
Alors que les premiers convois quittent les sites d’hébergement, l’espoir se mêle à l’appréhension. Le processus piloté par Jacquemain Shabani marque une étape cruciale dans la gestion post-catastrophe, mais il ne sera qu’un pansement si des politiques urbaines radicales ne voient pas le jour. La résilience de Kinshasa face aux dérèglements climatiques dépendra de sa capacité à transformer cette crise en électrochoc institutionnel. Pour des milliers de sinistrés, l’enveloppe reçue n’est qu’un premier pas sur le long chemin de la renaissance.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd