Alors que les caisses provinciales affichent un rythme d’exécution budgétaire insolent – 70% du budget Kinshasa 2023 déjà consommé en huit mois –, l’exécutif provincial justifie cette frénésie dépensière par l’urgence des travaux de réhabilitation des routes. Ce mercredi 13 août, le Conseil des ministres provinciaux a dévoilé l’orientation massive des 1,29 milliard de dollars américains vers la voirie, un choix stratégique qui interroge sur les priorités d’une capitale aux multiples fractures sociales.
Le porte-parole provincial a égrené les chantiers phares : l’aménagement de la place de la gare de Kintambo, l’érection d’un immeuble-parking à Mapenza, et la modernisation des artères de Barumbu, Kinshasa et Kintambo. « Soixante-neuf kilomètres de routes asphaltées en béton armé sont achevés », a-t-il annoncé, brandissant un tableau récapitulatif devant des ministres visiblement satisfaits. Mais cette frénésie de construction suffira-t-elle à apaiser les craintes des Kinois ?
Dans un ton martial, le gouverneur Daniel Bumba a sommé son gouvernement de « suivre de près » les travaux, martelant le triptyque routes-assainissement-sécurité comme mantra de son mandat. Un impératif qui résonne comme un aveu implicite : la réhabilitation des routes à Kinshasa, si elle comble les nids-de-poule, laisse béantes les failles d’une sécurité publique déliquescente. Les ministres provinciaux ont d’ailleurs unanimement déploré la recrudescence du banditisme urbain, ce cancer qui ronge les quartiers populaires malgré les millions injectés dans le béton.
Face à cette vague criminelle, le gouverneur Bumba a ordonné au ministre de l’Intérieur provincial d’activer les « mécanismes de collaboration entre police et population ». Une injonction qui sent le vœu pieux tant les brigades de proximité manquent cruellement de moyens. Le banditisme urbain à Kinshasa serait-il le prix à payer d’une gouvernance trop focalisée sur l’asphalte ?
L’ombre des travaux de voirie en RDC plane aussi sur la rentrée scolaire. Le conseil a plaidé pour une « collaboration étroite » entre ministères afin d’offrir un « environnement scolaire sain ». Preuve que le gouverneur tente d’élargir son champ d’action au-delà des seuls chantiers routiers. Reste à savoir si cette volonté affichée se traduira en actes concrets ou si elle demeurera un vœu inscrit au procès-verbal.
Alors que les pelleteuses s’activent sur les axes structurants, Daniel Bumba joue sa crédibilité sur deux fronts : prouver que les travaux de voirie à Kinshasa ne sont pas un gouffre à dollars et endiguer la violence urbaine qui mine la capitale. Un pari complexe où chaque kilomètre de bitume devra compter double : désenclaver les quartiers et redonner confiance à une population épuisée par l’insécurité.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net