Chaque matin, Jean-Bosco, père de famille à Matete, serre les dents devant l’océan de voitures immobiles. « Partir à 6h pour arriver à 9h au bureau : c’est un combat quotidien qui épuise ma famille et menace mon emploi », témoigne-t-il, miroir des milliers de Kinois pris au piège de la saturation routière. Dans les quatre districts de la capitale congolaise – Tshangu, Funa, Mont-Amba et Lukunga – les embouteillages monstres à Kinshasa sont devenus une torture urbaine, rongeant le temps précieux des élèves, étudiants et travailleurs.
Cette paralysie chronique des transports publics à Kinshasa n’est pas une fatalité, alerte le Commandant Ilunga Lukunga Serge, expert en mobilité urbaine. Dans un entretien percutant, il assène : « Kinshasa est une mégapole. Elle ne peut pas fonctionner sans un système de train urbain efficace ». Un constat implacable face à une ville où la densité démographique explose tandis que les infrastructures routières suffoquent. Les bus et taxis-bus, souvent bondés au-delà du raisonnable, ne répondent plus aux besoins criants de mobilité Kinshasa.
Comment sortir de cette spirale infernale ? Pour le pilote de lignes expérimenté, la solution réside dans un projet structurant : le développement urgent d’un train urbain RDC. Cette alternative ferroviaire pourrait selon lui :
Désengorger durablement les artères stratégiques comme le boulevard Lumumba ou l’avenue de l’OUA, transformées en parkings géants aux heures de pointe. Réduire radicalement les temps de trajet, passant d’heures interminables à des déplacements prévisibles. Garantir une ponctualité retrouvée aux usagers, notamment aux écoliers dont l’assiduité souffre dramatiquement. Insuffler une dynamique économique en fluidifiant les échanges entre quartiers périphériques et centres d’activité.
« Plusieurs capitales africaines ont sauté le pas avec succès. Pourquoi Kinshasa resterait-elle à quai ? », interroge-t-il, citant en exemple les réseaux ferroviaires émergents à Addis-Abeba ou Abidjan. Le constat est sans appel : la saturation routière au Congo atteint un seuil critique où l’improvisation n’est plus permise.
Mais cet appel pressant implique un changement de braquet politique. L’expert en transport public Kinshasa exhorte les autorités provinciales et nationales à faire de cette priorité un projet phare du mandat en cours. « Les investissements doivent cibler massivement les transports collectifs, avec une implication centrale des ingénieurs et techniciens congolais », plaide-t-il, soulignant l’impérieuse nécessité de solutions adaptées au terrain local plutôt que de modèles importés.
Alors que la colère gronde dans les files interminables, une question brûle les lèvres des Kinois : combien de temps encore devront-ils sacrifier leur santé, leur éducation et leur productivité sur l’autel de l’immobilisme ? Le train urbain apparaît plus que jamais comme le chaînon manquant d’une métropole asphyxiée par sa propre croissance. L’heure n’est plus aux diagnostics mais à l’action, avant que la ville ne se transforme en gigantesque parking à ciel ouvert.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net