Le cliquetis des sabres résonnait encore sur les pavés de Sandhurst lorsque Antony Pauni, 24 ans, ajustait son uniforme sous les regards émus de l’ambassadeur congolais. Vendredi 8 août 2025 restera gravé dans les annales militaires congolaises : pour la première fois depuis plusieurs décennies, un compatriote franchissait les portes de la prestigieuse académie royale militaire britannique. Qui aurait imaginé qu’un ingénieur en développement web, né à Kisangani pendant la guerre des Six Jours, endosserait un jour l’uniforme de cette institution vieille de trois siècles ?
« C’est une fierté et un honneur, non seulement pour l’officier Pauni, mais aussi pour notre pays », confiait le Pr. Ndolamb Ngokwey, ambassadeur de RDC au Royaume-Uni, les yeux rivés sur le défilé parfaitement chorégraphié. Dans ce ballet d’ordres brefs et de saluts au pas cadencé, se jouait bien plus qu’une simple cérémonie. Cet événement marque un tournant historique dans la coopération militaire entre la République Démocratique du Congo et le Royaume-Uni.
La formation réputée impitoyable de Sandhurst a forgé des légendes comme Winston Churchill ou le roi Abdallah II de Jordanie. Pourtant, le parcours d’Antony Pauni rompt avec la tradition. Entre les lignes de code informatique et les manuels de stratégie militaire, ce jeune Congolais a su tracer sa voie. « Sandhurst, c’est Sandhurst », lançait sobrement l’ambassadeur Ngokwey, résumant l’immensité de l’exploit.
Autour du déjeuner officiel, entre les tintements de verres et l’arôme du café, les langues dansaient au rythme des échanges : français, anglais, lingala, swahili. Cette mosaïque linguistique incarnait la singularité du nouveau diplomate en uniforme. « L’officier Pauni est le premier Congolais à franchir les portes de Sandhurst après plusieurs décennies… mais il ne sera pas le dernier », prophétisait l’ambassadeur en quittant la table.
Fondée en 1741, Sandhurst a formé des chefs d’État africains comme les ex-présidents nigérians Yakubu Gowon et Murtala Muhammed. Le diplômé congolais rejoint désormais ce panthéon. Cette percée interroge : annonce-t-elle une nouvelle ère dans la formation des élites militaires congolaises ? La coopération RDC-Royaume-Uni pourrait-elle inspirer une refonte des académies locales ?
Derrière le faste de la Sovereign Parade se profile un défi plus profond. Si la RDC célèbre son premier diplômé de Sandhurst depuis des décennies, saura-t-elle valoriser cet acquis ? L’ingénieur-officier incarne une génération hybride où l’excellence technologique épouse la rigueur martiale. Un modèle pour une armée en quête de modernité. Sa réussite ouvre surtout une brèche dans le plafond de verre qui limitait l’accès des Congolais aux formations militaires d’élite internationales.
Alors que les derniers échos de la parade s’évanouissent, une question persiste : ce premier diplômé congolais de Sandhurst sera-t-il le ferment d’une nouvelle doctrine de défense nationale ? La réponse se construira au fil des prochaines promotions, mais une certitude s’impose déjà : Antony Pauni vient d’écrire une page d’histoire.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net