Dans le territoire d’Irumu, province de l’Ituri, des mères scrutent les yeux creux de leurs enfants malnutris. « Comment survivre quand les conflits nous chassent de nos champs et que la pluie ne vient plus ? », murmure une déplacée, résumant l’urgence qui a poussé la France à agir. L’Ambassade française en RDC vient d’octroyer une subvention de 1,5 million d’euros à Première Urgence Internationale et Solidarités International pour une intervention d’urgence multisectorielle. Ce financement s’inscrit dans l’Initiative Française pour la Sécurité Alimentaire et la Nutrition (IFSAN), bras humanitaire de Paris face aux crises alimentaires.
Débuté en août pour 12 mois, ce projet adopte une approche mobile et flexible dans un contexte d’insécurité persistante et de déplacements massifs. L’objectif ? Briser le cycle infernal de la faim aiguë. « Des impacts concrets pour les populations les plus vulnérables », souligne le communiqué de l’ambassade. Le projet cible 6 311 enfants de 0 à 23 mois et 3 315 femmes enceintes ou allaitantes, leur offrant un accès gratuit aux soins et une prise en charge nutritionnelle adaptée. Une bouée de sauvetage dans cette région où les centres de santé peinent à fonctionner.
Mais l’aide d’urgence ne suffit plus. Face aux périodes de soudure qui plongent des familles entières dans le désarroi, 520 ménages recevront des transferts monétaires. Cette assistance alimentaire cible précisément les zones les plus éprouvées par l’insécurité alimentaire en RDC. L’originalité du projet réside dans son volet de relèvement durable : 90 ménages seront accompagnés pour développer des activités génératrices de revenus, tandis que 430 autres bénéficieront d’un soutien à la relance agricole. Une stratégie pour reconstruire l’autonomie brisée des communautés.
Cette intervention tombe à pic alors que la RDC bat des records macabres. Les dernières analyses IPC révèlent que 28 millions de Congolais – soit un quart de la population – souffrent désormais de faim aiguë. Parmi eux, 3,9 millions sont en phase d’urgence, au bord de la famine. Un bond de 2,5 millions depuis décembre, directement lié à la recrudescence des violences dans l’Est. Les déplacés internes, ces invisibles du conflit, paient le plus lourd tribut : sur deux millions de personnes déracinées, 738 000 connaissent des niveaux de faim catastrophiques.
Dans les provinces orientales, l’agriculture s’effondre sous les coups de boutoir des conflits armés et des chocs climatiques. Des familles entières ont perdu bétail et outils de survie, transformant des régions autrefois fertiles en déserts alimentaires. Ce projet nutrition en Ituri représente-t-il une goutte d’eau dans l’océan des besoins ? Sans doute, mais il illustre la nécessité d’actions coordonnées face à l’effondrement des systèmes de subsistance. Alors que plus de dix millions d’habitants de l’Est sont en insécurité alimentaire aiguë, cette aide humanitaire urgente rappelle que derrière les statistiques glaçantes, des vies humaines se jouent chaque jour de leur survie.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd