Alors que le palais de la Nation prépare l’acte II du gouvernement Suminwa, l’est du pays saigne encore. Deux réalités congolaises se télescopent ce lundi : les jeux d’influence autour du remaniement ministériel et le carnage perpétré par les présumés ADF à Komanda, en Ituri. Le président Tshisekedi joue-t-il son va-tout politique sur fond de crise sécuritaire persistante ?
Lors du dernier Conseil des ministres, Félix-Antoine Tshisekedi a officialisé l’imminence d’un remaniement gouvernemental tant attendu. Selon Info 27, ce futur exécutif, baptisé Suminwa II, serait le fruit d’arbitrages serrés au sommet de l’État. Paradoxe apparent : un gouvernement annoncé plus resserré pour gagner en efficacité, mais élargi pour intégrer des forces politiques marginalisées. Derrière la vitrine du consensus, une sélection impitoyable s’opérerait : des ministres jugés peu performants seraient évincés, tandis que les garants de la vision présidentielle seraient confortés.
Ce remaniement, analysé comme l’aboutissement d’un processus initié en mars par le conseiller sécuritaire Eberande Kolongele, maintient un suspense politique maximal. Une certitude émerge pourtant des rédactions : la reconduction de Judith Suminwa à la primature. Mais cette stabilité apparente masque une féroce bataille d’influence. Le Potentiel observe que ministres en poste, anciens conseillers et figures politiques multiplient les manœuvres pour capter la faveur présidentielle. Stratégie à courte vue ? Pour Congo nouveau, ce remaniement équivaut à un report du dialogue national porté par les églises, fragilisant ainsi les espoirs d’union sacrée.
Dans l’ombre des tractations kinoises, l’Ituri subit une nouvelle tragédie. La nuit du 26 au 27 juillet, des assaillants identifiés comme des rebelles ADF ont transformé Komanda en scène de cauchemar. Le Potentiel rapporte un bilan provisoire de 43 morts, principalement des fidèles pris au piège lors d’une veillée religieuse dans la salle CARITAS. Mediacongo.net décrit des assaillants « majoritairement jeunes et lourdement armés » incendiant une quarantaine d’habitations autour de Buliki. La psychose s’est désormais installée, au point que les habitants refusent d’inhumer les victimes en l’absence des autorités provinciales.
La Nouvelle société civile d’Irumu dénonce un « crime de guerre commis en plein lieu de culte » et un « sabotage envers le gouvernement ». Cette attaque, la plus meurtrière depuis deux ans dans la région, rompt brutalement une période d’accalmie relative. Comment interpréter ce regain de violence au moment précis où Kinshasa restructure son équipe gouvernementale ? Le timing interroge : les groupes armés profiteraient-ils des turbulences politico-administratives pour frapper ?
Alors que Judith Suminwa s’apprête à diriger un gouvernement remodelé, la pression sécuritaire atteint un paroxysme. Ce double défi – recomposition politique et stabilisation du territoire – constituera l’épreuve du feu pour l’exécutif congolais. La crédibilité du futur gouvernement se jouera autant dans les salons feutrés de Kinshasa que dans les plaines ensanglantées de l’Ituri. Le président Tshisekedi pourra-t-il concilier impératifs de stabilité institutionnelle et réponse sécuritaire efficace ? La réponse déterminera la trajectoire d’une nation à la croisée des chemins.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
