« Imaginez : hier encore, vous receviez des antirétroviraux pour contrôler votre VIH. Aujourd’hui, les stocks sont vides et votre espoir de survie s’évapore. C’est la réalité pour des centaines de Congolais abandonnés par la coupure des financements », lance Maneji Mangundu, directeur pays d’Oxfam en RDC, la voix nouée par l’émotion. Ce mardi 15 juillet, son état des lieux glaçant a révélé l’ampleur de la catastrophe humanitaire déclenchée par la décision américaine de réduire de 70% l’aide de l’USAID.
Les chiffres donnent le vertige : 750 000 bénéficiaires perdus en un an, 6 millions de personnes brutalement privées d’assistance alimentaire et médicale. Mais c’est dans les cliniques du Nord-Kivu que le drame devient tangible. « Sur 200 patients sous traitement contre le VIH/SIDA, près de 80% sont décédés par manque de médicaments », détaille Mangundu lors d’un point presse conjoint avec les directrices exécutives d’Oxfam Amérique et Québec. Une hécatombe silencieuse qui questionne : jusqu’où peut-on sacrifier des vies humaines sur l’autel des ajustements budgétaires ?
À ses côtés, Béatrice Vaugrante, directrice d’Oxfam Québec, dénonce une « coupure brutale et sans préavis » qui a paralysé le retour des déplacés de Goma et Sake. « Comment reconstruire sa vie quand les programmes de réinsertion s’arrêtent net ? », interroge-t-elle, avant d’adresser un message cinglant aux nations tentées de suivre l’exemple américain : « La sécurité mondiale ne se bâtit pas qu’avec des armes. Elle exige aussi de la solidarité. »
Face à l’urgence, Abby Maxan d’Oxfam Amérique promet un plaidoyer musclé : « Nous rencontrerons l’administration Trump et les bailleurs pour rectifier les fausses informations circulant sur la RDC. » Un effort contredit par l’ambassadrice américaine Lucy Tamlyn qui, sur RFI, assure que l’aide « continue sous supervision du Département d’État ». Pourtant, dans les centres de santé de l’Est, le constat est sans appel : les stocks de médicaments vitaux s’amenuisent comme peau de chagrin.
Cette crise multidimensionnelle – où se mêlent conflits armés, effondrement sanitaire et abandon des plus vulnérables – pose un dilemme fondamental : l’aide internationale est-elle un luxe optionnel ou un devoir moral ? Alors que le Canada envisage à son tour des coupes budgétaires, la directrice québécoise lance un ultime appel : « Kinshasa doit porter ce combat dans tous les forums internationaux. Des vies congolaises dépendent de notre capacité collective à défendre l’humanité. » Dans l’attente, des milliers de patients scrutent chaque jour l’horizon, espérant en vain l’arrivée des camions d’aide.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd