Dans un contexte géopolitique volatile, l’ancien chef de l’État Joseph Kabila effectue depuis le début de la semaine une visite remarquée à Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu. Cette démarche s’inscrit dans une série de consultations politiques initiées dans l’Est de la République démocratique du Congo, particulièrement significative alors que la région subit l’occupation de la rébellion M23 soutenue par le Rwanda. Quelle portée symbolique revêt cette présence dans une zone en proie aux tensions sécuritaires ?
L’arrivée de l’ancien président dans cette province natale a immédiatement provoqué une onde de choc dans l’arène politique congolaise. Néhémie Mwilanya, ancien directeur de cabinet de Kabila et figure influente du Sud-Kivu, a salué sur les réseaux sociaux un « acte de solidarité plein de symboles ». Dans un message publié sur X, ce natif de Fizi a souligné l’importance de ce déplacement « en cette période où les Kivutiens subissent les conséquences de la déconnexion du système financier par Kinshasa », adressant au passage un « Chaleureuse bienvenue au Sud-Kivu, terre qui vous a vu naître ».
Cependant, cette lecture positive est loin de faire l’unanimité. La coalition des mouvements Wazalendo, fer de lance de la résistance contre le M23, a publié un communiqué cinglant ce mercredi 25 juin. Les patriotes dénoncent une démarche « contre-productive », rappelant avec virulence que les « 18 années de pouvoir de Kabila n’ont pas permis au pays de prendre son envol ». Cette opposition frontale illustre les fractures persistantes de la scène politique congolaise, où le bilan de l’ancien régime reste un marqueur de divisions.
Dans l’ombre de ces polémiques, Joseph Kabila poursuit activement sa tournée consultative. Des sources locales confirment la tenue ce mercredi de rencontres stratégiques à Mbobero, dans le territoire de Kabare. Plusieurs représentants des mouvements citoyens et personnalités politiques ont été conviés à ces échanges, dans ce qui s’apparente à une tentative de repositionnement sur l’échiquier congolais. Cette initiative interroge sur la stratégie d’un homme clé de la transition politique, dont l’influence demeure prégnante dans les provinces orientales.
Au-delà des postures, cette visite soulève des questions fondamentales sur l’avenir des Kivus. Dans quelle mesure ces consultations politiques peuvent-elles réellement influencer la résolution de la crise sécuritaire qui mine la région ? La présence de l’ancien président dans une zone sous occupation du M23 introduit-elle un nouveau paramètre dans l’équation déjà complexe du conflit ? Alors que les Wazalendo maintiennent leur rejet catégorique, cette démarche pourrait exacerber les tensions dans une région où chaque geste politique est scruté à la loupe.
Cette séquence révèle surtout les lignes de faille d’une nation en quête de stabilité. Entre symboles de continuité et rejet d’un passé récent, les consultations de Bukavu pourraient bien déterminer la capacité des acteurs historiques à peser sur les prochains enjeux électoraux. Un jeu d’équilibre périlleux, où la mémoire des 18 années de pouvoir kabiliste demeure l’épée de Damoclès suspendue au-dessus de toute velléité de retour.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net