L’accord sécuritaire scellé vendredi à Kinshasa entre la RDC et l’Ouganda suscite un espoir mesuré dans le Nord-Kivu. La révision du mémorandum opérationnel permet désormais aux forces conjointes FARDC-UPDF d’étendre leur champ d’action au territoire de Mambasa, dans la province de l’Ituri. Cette extension couvrira également les zones de Djugu, Irumu, Mahagi et Aru, régions stratégiques minées par l’activité de groupes armés.
À Beni, épicentre des violences des ADF, élus locaux et représentants communautaires ont unanimement salué cette décision lors d’une assemblée samedi. « Cette coopération militaire RDC-Ouganda constitue un rempart essentiel contre l’ensauvagement de notre territoire », a déclaré un notable présent à la réunion. Les massacres répétés ayant fait plus de 6 000 morts depuis 2014 justifient cet accueil favorable, teinté néanmoins d’exigences opérationnelles.
Le lieutenant-général Banza Mwilambwe Jules et le général ougandais Muhoozi Kainerugaba ont réaffirmé leur engagement à « anéantir définitivement la menace ADF ». Le nouveau cadre tactique prévoit un déploiement intensifié de troupes et de matériel dans les zones frontalières. Mais suffira-t-il à inverser la dynamique sécuritaire ?
Les populations formulent des demandes précises : des opérations FARDC-UPDF plus ciblées et une présence militaire accrue dans les secteurs de Beni-Mbau et Ruwenzori. Ces zones agricoles vitales, théâtre récurrent d’attaques meurtrières, nécessitent selon eux l’installation immédiate de bases avancées des UPDF. « Seule une occupation permanente du terrain brisera le cycle des massacres », insiste un élu provincial.
La coordination du renseignement et la synergie des frappes aériennes figurent parmi les priorités évoquées. Des sources sécuritaires confirment que le dispositif intégrera des unités spécialisées dans la traque en milieu forestier. Cette lutte contre ADF Nord-Kivu exige désormais une réponse transfrontalière implacable, alors que les rebelles ont étendu leur influence jusqu’aux abords de Bunia.
L’extension des opérations en Ituri représente un défi logistique majeur. Le territoire de Mambasa, vaste de 36 000 km², nécessitera des moyens de déploiement rapide et des corridors humanitaires sécurisés. Les chefs militaires ont convenu d’un partage des responsabilités : les FARDC contrôleront les axes routiers tandis que les UPDF mèneront des raids profonds dans les bastions rebelles.
Cette collaboration inédite suscite des interrogations légitimes. Comment garantir la protection des civils lors d’offensives conjointes ? La présence accrue de troupes ougandaises répondra-t-elle aux standards des droits humains ? Les autorités provinciales promettent un mécanisme de suivi indépendant, tandis que Kinshasa assure que toute violation entraînera un réexamen immédiat du partenariat.
Les prochaines semaines seront déterminantes. Les premiers contingents supplémentaires doivent arriver d’ici fin juillet dans les nouvelles zones d’opération. La population guette désormais la concrétisation sur le terrain de cet accord sécuritaire Beni-Kampala. L’enjeu dépasse la simple sécurisation : il s’agit de permettre le retour de 1,2 million de déplacés dans leurs terres agricoles et de rétablir l’économie régionale. La réussite de cette extension conditionnera la stabilité durable de l’Est congolais.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
