« J’ai 15 ans. Un homme m’a proposé de me donner à manger. Il m’a emmenée derrière un kiosque, il m’a violée. Après, il est parti comme si de rien n’était. Qui peut m’aider ? » La voix brisée de Rose, rencontrée à Matete, résonne comme un symbole des violences sexuelles à Kinshasa qui transforment les rues en zones de guerre invisible. Loin des conflits armés, ces adolescentes survivent sous les ponts ou le long du boulevard Lumumba, livrées à une impunité systémique qui favorise les agressions.
Comment expliquer qu’en plein cœur de la capitale congolaise, des centaines de mineures subissent quotidiennement ces atrocités ? La réponse se niche dans leur extrême vulnérabilité. Sans abri, sans protection familiale, ces filles des rues de la RDC deviennent des cibles faciles. Sandrine, 17 ans, secteur de Limete, décrit l’horreur ordinaire : « Un policier nous a menacées avec son arme. Il a dit que si on ne faisait pas ce qu’il voulait, il allait nous arrêter. J’ai pas eu le choix. » Policiers, agents municipaux ou simples passants – les agresseurs profitent d’un système où pouvoir et argent étouffent toute dénonciation.
L’impunité violences Congo devient alors une règle implacable. Clarisse, mère à 16 ans d’un nourrisson, résigne : « Quand on est blessée, on se débrouille entre nous. Si on parle, les autres disent que c’est normal. Alors on se tait. » La peur, la honte et l’absence totale de recours institutionnel créent un mur de silence. Combien de filles rues RDC subissent ce calvaire sans jamais consulter un médecin ou porter plainte ? Les témoignages suggèrent une tragédie sous-déclarée mais massivement répandue.
Face à cette crise, quelques ONG femmes Kinshasa tentent d’apporter une lueur d’espoir. Distribution de kits d’hygiène, abris temporaires, soutien juridique – les actions d’urgence se heurtent pourtant à l’ampleur des besoins. Benie Banzila, secrétaire de l’ONG Les Femmes des Valeurs, alerte : « Ces filles vivent un conflit urbain Congo : exploitées, violentées et oubliées. Leur souffrance est réelle, même si elle ne fait pas de bruit. » Un constat glaçant qui interpelle sur l’échec des mécanismes de protection.
En cette Journée internationale pour l’élimination de la violence sexuelle en temps de conflit, un rappel s’impose : les violences sexuelles Kinshasa ne se limitent pas aux zones de guerre. Elles prospèrent dans l’indifférence générale, transformant les artères de la capitale en territoires hostiles. « Il est temps de briser l’impunité et redonner à toutes les mêmes chances de vivre », conclut Benie Banzila. Un appel urgent alors que des milliers de mineures continuent de dormir à la belle étoile, leur corps devenu un champ de bataille.
La question demeure : jusqu’à quand la société congolaise tolérera-t-elle que ses filles soient sacrifiées sur l’autel de l’indifférence ? Sans réponse institutionnelle forte, sans financements pérennes pour les structures d’accueil, ce conflit urbain silencieux risque de générer des séquelles irréparables. Les rues de Kinshasa doivent cesser d’être des couloirs de terreur pour celles qui n’ont pour seul crime que d’être pauvres et sans défense.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
