Imaginez un hôpital où les médicaments manquent, où les médecins fuient, et où les blessés de guerre affluent sans répit. Ce tableau apocalyptique est devenu réalité dans l’Est de la République Démocratique du Congo, selon le rapport CICR RDC présenté ce mardi 17 juin. L’étude menée d’avril à mai 2025 sur 109 centres de santé sonne l’alerte : la région des Kivu subit un effondrement système santé sans précédent, une véritable crise sanitaire Kivu nourrie par les conflits armés et le tarissement des fonds humanitaires.
Comment une région peut-elle soigner ses populations lorsque les routes deviennent des champs de bataille ? Les chiffres du CICR révèlent l’ampleur du désastre : au premier trimestre 2025, les provinces du Nord et Sud-Kivu ont enregistré une multiplication par quatre des morts-nés dans les structures médicales suivies. Pire encore, le nombre d’enfants vaccinés s’est effondré, passant de 67 000 début 2023 à seulement 29 000 cette année. Une génération sacrifiée sur l’autel de l’insécurité.
Les blessés par armes affluent dans des hôpitaux déjà exsangues : 2 351 cas traités en trois mois, soit une augmentation vertigineuse de 172% par rapport à 2024. « Le conflit armé santé RDC paralyse tout », explique un humanitaire sous couvert d’anonymat. « Transférer un blessé relève de l’exploit quand les groupes armés contrôlent les axes routiers ». Conséquence directe : le personnel médical fuit en masse, laissant des dispensaires fantômes où les rares médicaments restants sont pillés – trois centres sur cinq ont subi ce sort selon l’enquête.
Derrière ces statistiques glaçantes se cache une autre tragédie invisible : l’explosion des besoins en santé mentale. Rien qu’au Nord-Kivu, 4 600 cas ont été recensés, sept fois plus qu’en 2024. Comment ne pas sombrer quand on survit entre pillages et déplacements forcés ? La réponse humanitaire elle-même est menacée par l’érosion du financement humanitaire Kivu. « L’heure est grave », insiste Jean-Nicolas Parqueta-Rouleau, chef des opérations du CICR en RDC. « La vie de millions de personnes est menacée à terme ».
Face à cette hémorragie sanitaire, le CICR lance un triple appel. Aux belligérants : respecter le droit humanitaire et protéger soignants et blessés. Au gouvernement congolais : coordonner d’urgence avec les ONG. Aux bailleurs internationaux : débloquer des fonds vitaux malgré la conjoncture économique difficile. Car dans l’ombre des combats, des lueurs d’espoir persistent : de janvier à mai 2025, le CICR a soutenu 15 centres de santé, permis 7 000 interventions chirurgicales et offert un soutien psychosocial à 33 800 personnes. Mais ces actions restent une goutte d’eau face à un tsunami humanitaire.
La communauté internationale parviendra-t-elle à éviter l’irréparable ? L’effondrement du système sanitaire congolais n’est pas une fatalité, mais il exige une mobilisation immédiate. Comme le souligne le rapport, chaque jour perdu se compte en vies sacrifiées et en séquelles irréversibles pour les populations des Kivu. L’accès aux soins n’est pas une faveur, mais un droit fondamental que les balles et l’indifférence ne devraient jamais anéantir.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd