La cité de Beni, au Nord-Kivu, respirait à nouveau ce jeudi 19 juin après une nuit de vive tension. La veille, un simple accident de circulation avait dégénéré en scène de violence urbaine, plongeant le chef-lieu provisoire de la province dans un climat de peur. Comment un événement routier banal a-t-il pu mettre une ville entière sous pression ?
Tout commence mercredi matin sur le boulevard Nyamwisi, artère vitale de Beni. Un véhicule humanitaire, appartenant à une agence non précisée, percute une moto transportant deux passagers. L’impact provoque immédiatement un attroupement massif. Très vite, la colère gronde parmi les habitants qui accusent le chauffeur du véhicule humanitaire d’imprudence.
La situation bascule lorsque des individus tentent de s’en prendre physiquement au véhicule accidenté. Des pierres sont lancées, la foule devient menaçante. Alertée, la police intervient avec célérité. Pour disperser les manifestants, des coups de feu en sommation sont tirés en l’air. Ces détonations sèment instantanément la panique dans tout le centre-ville.
Le bruit des coups de feu à Beni agit comme un électrochoc. Terrifiés, des centaines d’habitants fuient en courant, cherchant un abri improbable. Les commerçants, pris de court, baissent précipitamment leurs rideaux de fer. En quelques minutes, l’activité économique est paralysée. Les rues habituellement animées se vident, transformant Beni en ville fantôme en plein jour. Cette paralysie témoigne-t-elle d’une défiance profondément ancrée envers les forces de l’ordre ?
Pendant des heures, une tension palpable règne dans le Nord-Kivu. Les forces de sécurité restent déployées en nombre, surveillant les moindres mouvements de foule. Des témoins évoquent un sentiment de siège, renforcé par le souvenir des conflits armés qui ont régulièrement ensanglanté la région. Le véhicule humanitaire accidenté, symbole malheureux de la crise, reste gardé par des policiers jusqu’en fin de journée.
Ce jeudi matin pourtant, un calme relatif est revenu à Beni. Les boutiques ont rouvert timidement et la circulation reprend progressivement ses droits sur le boulevard Nyamwisi. Mais ce retour à la normale reste fragile, teinté d’une méfiance persistante. Les autorités locales appellent au calme tout en promettant une enquête approfondie sur les circonstances exactes de l’accident initial.
Les questions demeurent nombreuses. Pourquoi ce véhicule humanitaire a-t-il provoqué une réaction aussi virulente ? L’incident routier a-t-il servi de catalyseur à des frustrations plus profondes liées à la présence des ONG dans la région ? Les blessés des deux passagers de la moto, dont l’état n’a pas été communiqué, seront-ils pris en charge par l’agence impliquée ?
Cet épisode révèle la volatilité extrême du contexte sécuritaire au Nord-Kivu. Un simple accident suffit à réveiller les réflexes de survie d’une population traumatisée par des années de violence. Beni retient son souffle, consciente que la paix des rues ne signifie pas encore l’apaisement des esprits.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
