Dans les rues de Kindu, où le bruit des conflits couvre parfois la voix de la raison, une lueur d’espoir se profile pour les artisans de l’information. « Ici, chaque rumeur peut enflammer un quartier, chaque fausse nouvelle aggrave nos souffrances », confie un reporter local sous couvert d’anonymat. Cette réalité brutale est au cœur d’une initiative cruciale : la Fondation Hirondelle Maniema organise une formation intensive du 17 au 20 juin 2025, ciblant spécifiquement les journalistes de cette région en proie à l’instabilité.
Le projet, baptisé « Accès à des informations de haute qualité, utiles et précises sur la situation humanitaire et sécuritaire en RDC », ne se contente pas de dispenser des techniques journalistiques. Il forge une armure intellectuelle contre deux fléaux jumeaux : la désinformation galopante et les discours de haine qui empoisonnent le tissu social. Comment exercer un journalisme rigoureux quand les rumeurs se propagent plus vite que les balles ? La réponse réside dans ce programme innovant combinant sensibilité aux crises humanitaires et méthodes éprouvées de vérification des faits RDC.
Dandjes Luyila, analyste de la désinformation au sein de la Fondation Hirondelle, souligne l’urgence vitale de cette formation journalistes Kindu : « Nos confrères du Maniema naviguent quotidiennement dans un champ de mines informationnel. Guerres, déplacements de populations, crises sanitaires… Dans ce contexte, une information non vérifiée peut déclencher des violences communautaires. » Sa voix porte le poids de l’expérience terrain, rappelant que la région compte plus de 120 conflits actifs recensés.
L’expert détaille le cercle vicieux que cette formation entend briser : « Les périodes de crise sont des incubateurs à fausses nouvelles. Aujourd’hui, aucun journaliste ne peut prétendre à la rigueur sans maîtriser les outils de lutte contre la désinformation, qu’elle vienne des réseaux sociaux ou des marchés locaux. » Le programme inclura ainsi le décryptage des deepfakes, la traçabilité des sources et l’éthique du reportage en zones sensibles – des compétences qui transforment les observateurs passifs en remparts actifs contre la manipulation.
Cette formation journalistes Kindu s’inscrit dans une bataille plus large pour la crédibilité médiatique dans l’Est-Congo. Selon un récent rapport de l’ONU, 68% des habitants du Maniema doutent régulièrement des informations qu’ils reçoivent. Un climat de défiance où les rumeurs sur les mouvements armés ou l’aide humanitaire entravent toute stabilisation. La Fondation Hirondelle mise donc sur un effet multiplicateur : chaque participant deviendra un relais de bonnes pratiques dans sa rédaction, vérifiant méthodiquement chaque fait avant diffusion.
Mais au-delà des techniques, c’est une philosophie du journalisme sensible crises que promeut cette initiative. Comprendre comment interviewer une victime de violences sans retraumatiser, comment couvrir un déplacement massif de population sans attiser les tensions ethniques, ou encore comment rendre compte des besoins humanitaires sans instrumentalisation politique. Autant de défis qui requièrent autant d’empathie que de rigueur.
Alors que la RDC s’enfonce dans une crise sécuritaire aux ramifications complexes, cette formation apparait comme un vaccin contre l’infodémie. Elle pose une question essentielle : peut-on espérer la paix sans information fiable ? La réponse se construira à Kindu en juin 2025, où des journalistes armeront leurs plumes contre les mensonges qui tuent. Car dans l’Est congolais, chaque fait vérifié est une balle en moins dans le chargeur de la haine.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net