Dans un geste chargé de symbolisme fédérateur, le Président Félix Tshisekedi a officiellement désigné, ce vendredi 13 juin depuis Kolwezi, la province du Kwilu comme hôte de la 13e Conférence des Gouverneurs prévue en décembre 2025. Cette annonce, intervenant lors de la clôture des assises du Lualaba, ne se réduit pas à une simple rotation protocolaire. Elle consacre plutôt la reconnaissance d’une province née de l’éclatement du Bandundu, posant dès lors une question fondamentale : cette désignation marque-t-elle une nouvelle étape dans l’approfondissement de la décentralisation en RDC ?
La 12e session, articulée autour du thème « la santé comme facteur de cohésion sociale et de développement durable des provinces », a servi de tremplin à cette décision stratégique. Sous l’égide du chef de l’État, les travaux ont permis de réaffirmer la santé comme priorité nationale incontournable, tout en l’érigeant en véritable colonne vertébrale du développement provincial. Un repositionnement qui, selon les observateurs, répond autant à des urgences sanitaires qu’à une nécessité politique : ressouder le tissu social fragilisé par des années de centralisme.
Rappelons que l’existence même de cette Conférence des Gouverneurs puise sa légitimité dans l’article 200 de la Constitution du 18 février 2006. Ce texte fondateur consacre sans ambiguïté le principe de libre administration des provinces, leur autonomie de gestion des ressources et une décentralisation élargie. Il trace avec précision les frontières – parfois poreuses – entre les compétences exclusives du pouvoir central et celles partagées avec les entités provinciales. La loi organique n° 08/015 du 7 octobre 2008 en précise les mécanismes opérationnels, faisant de cette instance bien plus qu’un forum de discussion : un laboratoire de la gouvernance multiniveau.
À quoi sert concrètement ce rendez-vous itinérant, dont le caractère rotatif vise explicitement à « rapprocher le pouvoir central des réalités locales » ? Outre son rôle consultatif sur les politiques publiques et la législation nationale, la Conférence se donne pour mission d’émettre des avis structurants et de formuler des suggestions capables de consolider l’unité nationale. Elle réunit inévitablement les gouverneurs, le Président de la République, le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur, formant ainsi une arène unique de dialogue vertical. D’autres membres du gouvernement peuvent y être conviés selon les thématiques à l’ordre du jour, renforçant ainsi sa dimension interministérielle.
Le choix du Kwilu pour la Session gouverneurs 2025 n’est donc pas anodin. Cette province, emblématique des recompositions territoriales, incarne les défis persistants de la décentralisation congolaise. Félix Tshisekedi, en actant cette désignation, envoie un signal politique subtil : celui d’une attention particulière portée aux régissues issues des démembrements administratifs. Reste à savoir si cette volonté affichée se traduira par des avancées tangibles en matière d’autonomie provinciale. La mise en œuvre effective de la loi organique 08/015 demeure, à cet égard, un baromètre incontournable.
À dix-huit mois de l’échéance, les attentes sont déjà palpables dans le Kwilu. La Conférence de 2025 représentera-t-elle un simple exercice de style institutionnel ou le catalyseur d’une nouvelle dynamique décentralisatrice ? L’itinérance des assises, si elle permet de « coller » aux spécificités locales, suffira-t-elle à impulser des politiques adaptées aux territoires ? Le gouvernement central saura-t-il transformer les suggestions des gouverneurs en actions concrètes ? Autant d’interrogations qui planeront sur cette 13e édition, véritable test pour l’équilibre des pouvoirs entre Kinshasa et les provinces. La balle est désormais dans le camp des autorités provinciales pour préparer un agenda capable d’infléchir les politiques nationales.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd