Des cris d’enfants affamés déchirent la nuit dans la brousse de Minembwe, où des milliers de familles dorment à même la terre, fuyant les balles qui déchirent leur quotidien. “Nous lançons un appel au gouvernement congolais à pouvoir mobiliser les partenaires pour qu’enfin ces déplacés soient assistés”, implore Samy Kalonji Badibanga, administrateur du territoire de Fizi, la voix nouée par l’urgence. Son cri d’alarme révèle une tragédie silencieuse : 600.000 déplacés internes survivent dans une précarité inhumaine au cœur du Sud-Kivu, abandonnés à leur sort dans une dizaine de villages.
Ces femmes, ces enfants, ces vieillards viennent des hauts plateaux de Minembwe et du village de Rugezi, poussés sur les routes par les violents affrontements opposant depuis le 22 mars les FARDC et les groupes wazalendo à la coalition Twirwaheno Red Tabara alliée à l’AFC/M23. Trois secteurs – Lulenge, Mutambala et Tanganyika – sont transformés en champs de bataille, tandis que les localités de Kasongo, Fizi Centre ou Kaizaroho deviennent des refuges de fortune surpeuplés.
“Ces derniers manquent de tout”, insiste l’administrateur territorial, décrivant une crise humanitaire où l’absence d’aide condamne des populations entières. Comment une nation peut-elle laisser ses enfants dormir sous les étoiles sans eau potable ni nourriture ? La réponse se lit dans les yeux creusés des mères contraintes d’accoucher en pleine brousse, sans assistance médicale, tandis que leurs aînés errent sans toit.
Les enfants paient le tribut le plus lourd à cette guerre oubliée. Privés d’école depuis des semaines, ils deviennent des proies faciles pour les groupes armés qui rodent autour des sites de déplacés. “Ils peuvent être facilement enrôlés de force”, avertit Samy Kalonji, soulignant le cercle vicieux de la violence qui se nourrit du désespoir. À quel point faut-il attendre avant que ces gamins ne troquent leurs cahiers contre des kalachnikovs ?
Derrière les chiffres glacants des déplacés internes en RDC, ce sont des visages qui émergent : ceux de femmes enceintes marchant des kilomètres le ventre lourd, de vieillards traînant leurs maigres possessions dans des sacs en plastique, de familles entières partageant une poignée de manioc pour toute pitance. L’administrateur de Fizi dresse un constat accablant : “Ils sont abandonnés à leur triste sort”.
La crise qui frappe le territoire de Fizi dépasse la simple urgence humanitaire. Elle interroge notre capacité collective à protéger les plus vulnérables quand les conflits armés ravagent l’est du pays. Sans intervention rapide, cette génération d’enfants non scolarisés constituera le terreau fertile des prochaines rébellions. L’aide au territoire de Fizi n’est pas une option humanitaire – c’est un impératif de survie pour des centaines de milliers de Congolais que la guerre a jetés sur les chemins de l’exode intérieur.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd