Une étape décisive s’ouvre dans le dossier judiciaire visant Constant Mutamba, ministre d’État en charge de la Justice. Ce jeudi 12 juin, le Rapporteur de l’Assemblée nationale, Jacques Djoli, a procédé à l’installation solennelle de la Commission spéciale et temporaire chargée d’examiner le réquisitoire du Procureur général près la Cour de cassation. Cette procédure exceptionnelle fait suite à la demande d’autorisation de poursuites pour détournement de deniers publics contre le Garde des sceaux.
Le réquisitoire du procureur général Firmin Mvonde constitue un développement significatif dans cette affaire hautement sensible. Il intervient après une première autorisation d’instruction déjà obtenue contre le membre du gouvernement. Les investigations préliminaires auraient établi, selon le magistrat suprême, que les explications fournies par Constant Mutamba n’ont pu infirmer les charges pesant contre lui. Bien au contraire, les auditions menées auraient consolidé le dossier d’accusation, conduisant à ce nouveau réquisitoire pour détournement de fonds publics.
Comment les explications du ministre ont-elles pu renforcer les suspicions ? Le procureur général indique dans ses conclusions que les éléments présentés par l’accusé n’ont pas apporté la décharge escomptée, mais ont plutôt permis d’asseoir davantage l’accusation. Cette situation inédite où un ministre de la Justice est ainsi mis en cause par sa propre administration judiciaire soulève des questions fondamentales sur les mécanismes de contrôle des deniers publics en RDC.
Le bureau de l’Assemblée nationale a nommé avec célérité les membres de cette commission spéciale. Sous la présidence de Sindani Kandambu Donald, l’organe parlementaire comprend également Fumumapanda Malamba Zéphirin comme premier vice-président et Mpundu Lundeba Micheline en qualité de deuxième vice-présidente. Les fonctions cruciales de rapporteur et rapporteur adjoint ont été confiées respectivement à Bila Minlangu Claude et Bileni Cwinya’ay Dieudonné. Vingt-trois autres membres complètent cette instance qui devra travailler sans relâche.
Un calendrier contraignant a été fixé à cette commission. Les parlementaires disposent d’un délai d’un an pour mener leurs travaux et soumettre leurs conclusions à la plénière. Le rapport final devra être impérativement déposé avant la clôture de la session de mars 2025, prévue le 15 juin prochain. Cette échéance souligne l’urgence perçue par l’institution parlementaire dans le traitement de cette affaire emblématique.
Quelles seront les implications constitutionnelles de cette procédure ? L’article 108 de la Constitution congolaise prévoit que les poursuites contre un ministre ne peuvent être engagées qu’après autorisation de l’Assemblée nationale. La décision de cette commission spéciale s’annonce donc déterminante pour l’avenir judiciaire de Constant Mutamba. Si l’autorisation de poursuites est accordée, le ministre de la Justice deviendrait le premier membre du gouvernement actuel à faire l’objet d’une procédure criminelle en exercice.
Cette affaire intervient dans un contexte où la lutte contre la corruption en RDC fait l’objet d’un examen minutieux tant au niveau national qu’international. Le traitement réservé à ce dossier constituera un test significatif pour les institutions congolaises et leur capacité à appliquer le principe d’égalité devant la justice, indépendamment des fonctions exercées. L’installation de cette commission marque ainsi un moment charnière dans l’histoire judiciaire récente de la République Démocratique du Congo.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd