Dans les rues animées d’Uvira, où le lac Tanganyika caresse l’horizon de ses reflets argentés, une effervescence culturelle inédite s’empare de la cité. La 9e édition du Festival du Film Européen y déploie ses écrans comme des ponts entre les continents, transformant la capitale du Sud-Kivu en un carrefour de dialogues et d’émotions cinématographiques. Sept œuvres, soigneusement choisies, dessinent une cartographie de résilience face aux défis sécuritaires qui ombragent la région.
« Le cinéma n’est pas qu’un miroir, c’est un marteau pour forger des consciences », confie Charles Abema, coordonnateur de l’événement. Sa voix porte l’urgence d’une thématique brûlante : renforcer la résilience communautaire par l’art. Chaque projection devient alors un laboratoire où s’expérimente la reconstruction sociale. Les films sélectionnés – fictions et documentaires – tissent des récits où la paix et la cohésion sociale s’imposent en protagonistes invisibles.
Au-delà des séances, le festival orchestre une Master Class qui électrise les jeunes cinéastes locaux. Des professionnels aguerris partagent techniques et récits, transformant la salle de formation en creuset d’ambitions. « Comment raconter nos propres histoires sans tomber dans le misérabilisme ou l’angélisme ? », interroge une participante, résumant le défi d’une génération avide de s’approprier les codes narratifs.
Cette initiative, portée par la Délégation de l’Union européenne en RDC et le pôle EUNIC, s’inscrit dans une coopération culturelle plus vaste. Depuis le 17 mai, Kinshasa, Lubumbashi et Goma vibrent également au rythme des projections. Mais à Uvira, l’enjeu dépasse le divertissement : il s’agit de substituer aux blessures de l’insécurité une cicatrisation par l’imaginaire collectif.
Les nuits uviraises s’illuminent désormais de ces fictions venues d’Europe, mais qui trouvent ici un écho singulier. Dans l’obscurité des salles, les rires et les silences pesants se répondent, traçant une voie fragile vers la réconciliation. Le cinéma, art de l’éphémère, pourrait-il laisser une empreinte durable sur le tissu social ? La réponse se niche peut-être dans ces regards de jeunes réalisateurs congolais, déterminés à saisir la caméra comme outil de transformation.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
