Plus de 20 000 civils ont été contraints de fuir leurs foyers en l’espace de deux semaines en avril dernier dans le Nord-Kivu, selon un rapport du Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) publié le 16 mai. Cette hémorragie humaine, directement liée à l’escalade des conflits armés dans plusieurs zones de la province, illustre l’urgence d’une réponse sécuritaire et humanitaire coordonnée.
Les combats intenses du 18 au 27 avril dans la chefferie de Bwito (territoire de Rutshuru) ont précipité le déplacement de 10 600 personnes vers Tongo et Nyanzale. Onze villages des groupements de Tongo, Bukombo, Mutanda et Kihondo ont été le théâtre d’affrontements impliquant des groupes armés non identifiés. À Bwisha, autre épicentre de tensions dans le Rutshuru, des violences ciblées sur l’axe Bugomba-Katale ont mis fin à cinq mois d’accalmie relative.
Le territoire de Masisi subit une pression similaire. Des déplacements massifs ont été enregistrés dans les groupements Kibabi et Nyamaboko 2, bien que leur ampleur exacte reste impossible à évaluer. L’accès limité des humanitaires à ces zones, en raison de l’insécurité persistante, complique toute intervention d’urgence.
En parallèle de cette crise des déplacements, une menace sourde plane sur les populations : les engins non explosés. Le 16 avril, un enfant a perdu la vie et trois autres ont été blessés par l’explosion d’un de ces dispositifs à Sake. « Chaque jour, des familles marchent sur ces pièges mortels en tentant de fuir », déplore un responsable local sous couvert d’anonymat.
Face à cette double crise – sécuritaire et humanitaire –, les acteurs sur le terrain tentent de maintenir leurs opérations. Près de 20 000 personnes ont reçu des vivres à Kingarame (Nyiragongo), tandis que 18 000 déplacés à Luotu (Lubero) ont bénéficié d’articles ménagers essentiels. Mais ces efforts restent insuffisants au regard des besoins exponentiels.
La situation expose aussi les travailleurs humanitaires à des risques inédits. Vols à main armée, extorsions et menaces directes entravent régulièrement leurs missions. Comment assurer une assistance vitale quand les humanitaires eux-mêmes deviennent des cibles ? La question hante les réunions de coordination à Goma.
Avec des centaines de milliers de déplacés déjà entassés dans des sites surpeuplés, le Nord-Kivu semble au bord de l’asphyxie. Le dernier rapport OCHA souligne l’impérieuse nécessité d’un cessez-le-feu immédiat et d’un désengagement des groupes armés actifs dans la région. Sans cela, la province risque de sombrer dans une crise humanitaire sans précédent.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net