Dans un hémicycle tendu, le député national André Lite a interpellé le gouvernement congolais sur un dossier explosif : l’extension de Kinshasa face à la bombe à retardement urbaine. Lors de la plénière du 8 mai à l’Assemblée nationale, l’élu de Wamba a brandi l’urgence de repenser l’aménagement de la capitale, évoquant un risque de « pages sombres » dans l’histoire du pays si l’inaction persistait.
Face au ministre de l’Urbanisme Crispin Mbadu Phanzu, l’orateur a dépeint une Kinshasa étouffant sous le poids de ses 17 millions d’habitants. « Maluku et au-delà offrent des terres, mais où est la vision ? », a-t-il lancé, exigeant des comptes sur le projet d’extension placé sous l’égide de la Première ministre Judith Suminwa. Une question rhétorique qui résonne comme un coup de semonce dans un pays où 80% des constructions kinoises violent les normes urbanistiques.
Le parlementaire propose une feuille de route audacieuse : s’inspirer des expériences égyptienne et nigériane en matière de villes nouvelles. « Avec notre budget de 20 milliards, c’est une question de volonté politique », a-t-il asséné, soulignant l’absurdité d’une stagnation alors que des modèles africains prouvent qu’une alternative est possible. Une comparaison qui n’est pas sans piquer un gouvernement régulièrement accusé de prioriser les grands travaux symboliques sur les réformes structurelles.
En toile de fond de ce débat se profile le projet Maluku, présenté comme le sauveur économique de la capitale. La première phase, axée sur une zone industrielle génératrice de 10 000 emplois, tarde à montrer des résultats concrets. La réunion technique du 13 mars dernier entre la cheffe du gouvernement et le comité stratégique de supervision n’a visiblement pas suffi à dissiper les doutes sur l’avancement réel des travaux.
Derrière les joutes verbales parlementaires se cachent des enjeux bien plus larges. La crise d’urbanisation en RDC n’est pas qu’un problème technique : elle cristallise l’incapacité chronique de l’État à planifier le développement territorial. Les 145 territoires que compte le pays restent majoritairement des coquilles vides administratives, pendant que Kinshasa continue d’aspirer population et ressources dans un mouvement centripète mortifère.
La balle est désormais dans le camp du gouvernement Suminwa. Acceptera-t-il de transformer cet appel parlementaire en feuille de route opérationnelle ? Ou continuera-t-il à naviguer à vue, au risque de voir la capitale congolaise sombrer dans l’asphyxie urbaine ? La réponse déterminera si le Congo rejoindra le cercle des nations africaines ayant relevé le défi de l’urbanisation… ou celui des États condamnés à gérer des crises permanentes.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd