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Sud-Kivu : La terre avale des creuseurs artisanaux à Luhihi, entre négligence et fatalité

Dans la poussière étouffante des collines de Luhihi, au Sud-Kivu, la terre a une fois de plus révélé son visage meurtrier. Dimanche 4 mai, un éboulement dans le site aurifère artisanal de Lomera a enseveli des dizaines de creuseurs sous des tonnes de terre. Quatre corps ont été extirpés des décombres, mais les cris étouffés des familles résonnent encore : « Combien de vies faudra-t-il sacrifier avant que nos mines ne deviennent humaines ? »

Pascal Kazamba, de la Nouvelle dynamique de la société civile à Luhihi, décrypte l’horreur à chaud : « Les secours improvisent avec des pelles rouillées. Comment compter les morts quand le site devient un tombeau à ciel ouvert ? ». Sa voix se brise en évoquant ces corps prisonniers de la roche, ces familles condamnées à l’attente macabre.

Cette tragédie n’est pourtant pas une première. Dans la nuit du 24 au 25 avril, un autre glissement de terrain dans la même zone minière avait déjà fauché deux vies. Une répétition macabre qui interroge : pourquoi les creuseurs persistent-ils à défier la mort ? La réponse se niche dans les entrailles de l’économie de survie. « Ici, l’or paye le repas du soir, les frais scolaires, les médicaments », explique un ancien creuseur, les mains sillonnées de cicatrices. Entre la faim et le risque, le choix est une illusion.

Pourtant, derrière chaque pelletée de terre, se cache un système qui profite de cette misère. Les négociants achètent l’or à vil prix tandis que les creuseurs s’enfoncent dans des galeries sans étayage. « L’État perçoit des taxes mais ferme les yeux sur les conditions de travail », dénonce un membre de la société civile sous couvert d’anonymat. Les sites miniers artisanaux, bien que vitaux pour l’économie locale, fonctionnent dans une anarchie mortifère.

Le drame de Lomera révèle une fracture béante : celle d’une région riche en minerais mais pauvre en protection sociale. Les centres de santé manquent de matériel pour traiter les blessés, les équipes de secours professionnelles sont inexistantes. « Nous sommes nos propres sauveteurs », lance amèrement un habitant, montrant une corde usée servant à remonter les corps.

Cette catastrophe pose une question cruciale : jusqu’à quand la République Démocratique du Congo va-t-elle monnayer la vie de ses enfants contre des grammes d’or ? Les solutions existent – formation aux techniques minières sécurisées, mécanisation partielle, contrôles réguliers – mais se heurtent à l’indifférence des autorités et à la concurrence féroce des marchés internationaux.

En attendant, à Luhihi, les femmes trient le minerai au bord des fosses, les enfants transportent des sacs de terre aurifère, et les hommes redescendent dans les trous fraîchement déblayés. Car demain, il faudra bien manger. Et sous les pieds de chacun, la terre guette, prête à se refermer.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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