Alors que les salles de classe surpeuplées restent une réalité dans de nombreuses écoles publiques de la RDC, une initiative du Service national suscite à la fois espoirs et interrogations. Ce vendredi 2 mai 2025, la caravane des bâtisseurs de la nation a poursuivi sa mission de distribution de bancs-pupitres fabriqués dans ses ateliers, avec deux établissements kinois comme bénéficiaires.
À l’Institut Lumumba de Limete, fondé il y a 56 ans, 400 bancs ont été livrés sur les 700 promis. « Trois élèves par banc pour 2 100 écoliers », explique le lieutenant-général Jean-Pierre Kasongo Kabwik devant une assistance attentive. Mais derrière ces chiffres se cache une question cruciale : cette dotation suffira-t-elle à améliorer durablement les conditions d’apprentissage ?
Plus tôt dans la journée, l’Institut technique Magango de Mont-Ngafula recevait 300 unités. Une élève, porte-parole de ses camarades, a saisi l’occasion pour interpeller directement les autorités : « Nous rêvons de laboratoires modernes comme à Kaniama Kasese, pas seulement de bancs ». Ce cri du cœur révèle une attente plus large qui dépasse le simple mobilier scolaire.
Le commandant Kasongo reste cependant déterminé : « Le président de la République a ordonné que cette action se poursuive jusqu’à éradiquer le déficit en bancs dans toutes les écoles publiques ». Une ambition colossale quand on sait que selon le dernier rapport de l’UNICEF, près de 40% des établissements scolaires congolais manquaient encore de mobilier de base en 2023.
Certains enseignants rencontrés sur place accueillent favorablement cette initiative. « Avant, les élèves s’asseyaient à même le sol ou apportaient des chaises de maison », témoigne un professeur de mathématiques sous couvert d’anonymat. Mais d’autres soulignent les défis persistants : « Les bancs sont nécessaires, mais sans tableau digne de ce nom ni manuels scolaires, la qualité de l’enseignement reste compromise ».
L’aspect logistique de l’opération mérite également attention. Fabriqués dans les ateliers du Service national, ces bancs-pupitres standardisés répondent-ils aux besoins spécifiques des différents niveaux scolaires ? Le modèle unique distribué semble en tout cas soulever des questions d’ergonomie, notamment pour les cycles supérieurs.
Au-delà de la polémique sur les chiffres – 700 bancs promis ici, 300 livrés là – se profile un enjeu plus stratégique. Cette campagne de distribution s’inscrit dans un vaste plan de réhabilitation des infrastructures éducatives qui tarde à montrer des résultats concrets. Les promesses de construction de nouvelles écoles « type Kananga » restent pour l’heure lettre morte dans la capitale.
Reste que pour des milliers d’élèves kinois, cette journée du 2 mai 2025 marque une amélioration tangible de leur quotidien scolaire. « Enfin pouvoir écrire correctement pendant les cours », se réjouit une collégienne de l’Institut Lumumba. Un progrès modeste mais réel, qui pose cependant une question fondamentale : jusqu’à quand devrons-nous considérer l’accès à un siège en classe comme une avancée plutôt qu’un droit acquis ?
Alors que la caravane du Service national poursuit sa route, les regards se tournent désormais vers la province. Le pari est de taille : reproduire ce modèle à l’échelle d’un pays grand comme l’Europe occidentale. L’avenir dira si cette opération coup de poing saura évoluer vers une politique éducative globale et pérenne.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: mediacongo.net
