Dans une déclaration conjointe rendue publique ce mercredi 30 avril 2025, Martin Fayulu, Moïse Katumbi, Delly Sesanga et Joseph Kabila ont salué avec une prudence calculée les récentes avancées diplomatiques entre Kinshasa et Kigali. Tout en reconnaissant le caractère « significatif » des déclarations de Washington et des pourparlers sous médiation américaine, ces figures majeures de l’opposition congolaise ont martelé un message sans équivoque : aucune paix durable ne naîtra de solutions conçues hors des frontières congolaises.
« Proclamons en conséquence qu’un dialogue interne est indispensable », ont-ils insisté, brandissant l’initiative CENCO-ECC comme seul rempart contre les « solutions factices ». Leur plaidoyer, teinté d’un nationalisme stratégique, sonne comme un rappel à l’ordre aux partenaires internationaux : l’intégration économique régionale ne saurait primer sur la souveraineté congolaise. Une mise en garde qui résonne étrangement alors que s’accélère la course aux minerais stratégiques dans la région des Grands Lacs.
Derrière les appels à la « synergie » entre initiatives internationales perce une critique acerbe du régime en place. Les signataires pointent du doigt un cocktail explosif : violation constitutionnelle, gabegie financière et « consolidation de la dictature ». Des maux endogènes qui, selon eux, alimentent autant la crise que l’appétit des voisins régionaux. La référence aux « tenants illégitimes du pouvoir » ne laisse planer aucun doute sur leur cible – un pouvoir issu de « fraudes électorales » qui aurait troqué sa légitimité contre des soutiens étrangers.
Ironie du calendrier politique, cette sortie intervient à la veille de la présentation d’un projet de cessez-le-feu à Washington. Les opposants y voient-ils un écran de fumée masquant l’absence de réformes structurelles ? Leur insistance sur la publication intégrale des accords économiques sous-régionaux trahit une méfiance ancestrale : celle de voir se rejouer, sous couvert de coopération, le pillage organisé des ressources congolaises.
Pourtant, les signataires ne jettent pas le bébé diplomatique avec l’eau du bain politique. Leur satisfaction mesurée face au respect affirmé de l’intégrité territoriale dans les Principes de Washington révèle une stratégie en équilibre : soutenir les avancées tangibles tout en maintenant la pression sur les vrais enjeux. Un jeu de dupes où chaque communiqué devient une arme pour contester la légitimité du pouvoir en place.
La référence appuyée à la médiation de la CENCO-ECC n’est pas innocente. En exhumant cette initiative portée par les Églises, l’opposition tisse sa propre narrative : celle d’un Congo capable d’enfanter ses solutions hors des cénacles politiques corrompus. Mais ce choix soulève une question cruciale : les divisions historiques au sein de l’opposition ne risquent-elles pas de réduire ce dialogue à un théâtre d’ombres ?
Alors que Doha et Washington multiplient les sommets trilatéraux, la balle est désormais dans le camp du pouvoir. Acceptera-t-il de partager le monopole du dialogue politique ? Ou préférera-t-il, une fois encore, troquer des concessions régionales contre une survie politique à Kinshasa ? La réponse déterminera si les prochains mois verront éclore une véritable transition ou simplement une nouvelle saison de simulacres.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd