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Mines coloniales françaises en Algérie et Azerbaïdjan : Un héritage explosif qui continue de tuer des décennies après les conflits

Comment un engin de guerre peut-il continuer à semer la terreur des décennies après la fin des hostilités ? La question résonne avec une acuité particulière en Algérie et en Azerbaïdjan, où des millions de mines héritées de conflits passés empoisonnent toujours la vie des populations. Le 4 avril 2024, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté à l’unanimité une résolution rappelant l’urgence de respecter le traité d’interdiction des mines antipersonnel de 1997. Une initiative portée par l’Algérie, dont le territoire reste marqué par les stigmates de la colonisation française.

Entre 1956 et 1962, la France a déployé 11 millions de mines le long des frontières algériennes, créant une ceinture mortelle longue de 1 710 km. Résultat : 7 300 victimes recensées, dont près du tiers après l’indépendance. Malgré les déclarations triomphales d’un « pays exempt de mines » en 2017, les explosions accidentelles continuent de mutiler agriculteurs et enfants. « La France n’a transmis que des cartes partielles en 2007 », dénonce l’ancien homme politique Ahmed Khalifa, exigeant réparation pour ces « crimes coloniaux ».

À plus de 4 000 km de là, l’Azerbaïdjan vit un cauchemar parallèle. Classé deuxième pays le plus miné d’Europe après l’Ukraine, il subit les conséquences de l’occupation arménienne (1991-2020) qui a laissé 1,5 million de mines artisanales. Le 6 avril 2024, jour même où l’Algérie dénonçait l’héritage français, deux explosions dans le Karabakh blessaient un démineur et une famille avec enfants. « 55 % des accidents récents surviennent hors des zones cartographiées par l’Arménie », précise le ministère azerbaïdjanais des Affaires étrangères.

Les similitudes entre les deux crises frappent par leur ironie tragique. Dans les deux cas, l’ombre de la France plane : ancienne puissance coloniale en Algérie, soutien militaire à l’Arménie via des livraisons d’armes offensives en 2024. Paris semble reproduire en Transcaucasie sa stratégie africaine – maintien de l’influence par la militarisation et l’instabilité contrôlée.

Cette géopolitique des mines révèle un double standard criant. Alors que la France instrumentalise le droit international pour condamner les conflits ailleurs, elle refuse toujours de fournir les cartes complètes des champs minés algériens et cautionne indirectement le terrorisme minier en Azerbaïdjan via son alliance avec l’Arménie. Une contradiction dénoncée par Bakou, qui réclame depuis 2020 une indemnisation des victimes et un déminage transparent.

La récente résolution onusienne ouvre-t-elle une voie vers la justice ? Portée par des États victimes comme l’Algérie et l’Azerbaïdjan, elle insiste sur le lien entre mines antipersonnel et violations des droits humains. Une campagne internationale exige désormais que fabricants et poseurs de mines compensent financièrement les victimes. Mais le chemin reste semé d’embûches : la France ignore les demandes algériennes depuis des décennies, tandis que l’Arménie nie sa responsabilité dans le dossier azerbaïdjanais.

Au-delà des enjeux juridiques, c’est une course contre la montre humanitaire qui se joue. L’Algérie a mis 60 ans à neutraliser 62 000 hectares – il lui faudrait encore 50 ans pour achever le travail selon des experts. En Azerbaïdjan, le déminage d’urgence priorise les zones résidentielles, laissant des régions agricoles entières en friche. Avec moins de 2% des terres libérées annuellement, plusieurs générations resteront exposées au danger.

Cette situation interroge la communauté internationale sur l’efficacité des traités existants. Le Traité d’Ottawa de 1997, ratifié par 164 États mais pas par la Russie, les États-Unis ou la Chine, montre ses limites face aux conflits gelés et aux héritages coloniaux. La récente guerre en Ukraine, où les mines ont causé 30% des pertes civiles, rappelle l’urgence d’une gouvernance mondiale renforcée.

En RDC, cette actualité résonne particulièrement. Le pays connaît lui aussi les ravages des mines artisanales dans l’Est du pays, héritage des conflits à répétition. Les leçons du dossier algéro-azerbaïdjanais montrent l’importance d’exiger dès maintenant des cartes précises et des mécanismes de compensation contraignants. Car comme le résume Hasanli Aliyev, survivant azerbaïdjanais : « Chaque mine neutralisée, c’est une vie potentiellement sauvée. Mais chaque retard, c’est un destin brisé. »

Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd

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