La province du Lualaba, région clé pour l’exploitation du cobalt en RDC, est au cœur d’une dynamique économique bouleversante. Face à une chute spectaculaire des prix du cobalt, passant de 90 000 $ à moins de 25 000 $ la tonne sur le London Metal Exchange, le gouvernement congolais, via l’ARECOMS, a pris une décision drastique : suspendre temporairement l’exportation de ce minerai stratégique. Une action saluée par les organisations de la société civile qui espèrent une stabilisation du marché.
Le cobalt, souvent désigné comme le “minerai de l’avenir” pour son rôle vital dans les batteries des technologies électriques, est depuis des années un pilier de l’économie congolaise. Exploité majoritairement dans les provinces du Lualaba et du Haut-Katanga, environ 30 % de sa production est issue du secteur artisanal. Pourtant, cette richesse naturelle ne protège pas le pays des turbulences du marché international.
Avec la baisse des prix, les mineurs artisanaux se trouvent en première ligne des difficultés. Contraints de brader leur production, parfois pour des prix dérisoires, face à une saturation du marché dominée par des acheteurs internationaux, notamment chinois et libanais, leur situation est devenue précaire. Pire, les entreprises minières industrielles continuent d’inonder le marché mondial, aggravant ainsi la surproduction.
Les acteurs de la société civile, réunis sous la houlette de la plateforme CASMIA-G ASBL, estiment que la suspension des exportations est une mesure salvatrice. Selon eux, ce choix stratégique permettra de réduire les stocks mondiaux, relancer la demande et, in fine, rétablir des prix plus justes pour tous les exploitants. Ils appellent également à des réformes structurelles pour prévenir de telles crises à l’avenir.
Parmi leurs suggestions, on trouve la fixation de quotas de production afin d’éviter une nouvelle surproduction, la mise en place d’un registre clair et transparent des acteurs du secteur, et la stricte application de l’article 7 bis du Code minier. Ces mesures visent non seulement la stabilisation du marché mais aussi une meilleure transparence et une valorisation accrue des ressources nationales.
Pour aller plus loin, ces organisations militent en faveur de la création d’une raffinerie locale, financée par le Fonds pour les Générations Futures (FOMIN). Une telle initiative permettrait d’ajouter de la valeur au cobalt, de réduire la dépendance économique envers l’exportation brute et d’apporter des retombées économiques directes aux communautés locales.
Toutefois, un risque plane sur cette suspension temporaire : la corruption. Les acteurs de la société civile mettent en garde contre toute tentative de pots-de-vin visant à contrecarrer cette mesure. Ils soulignent l’importance d’une vigilance accrue pour garantir le succès de cette réglementation temporaire.
Alors que le cobalt est plus que jamais au centre des enjeux énergétiques mondiaux, la RDC joue ici une carte audacieuse. Le positionnement du pays à travers cette mesure pourrait bien lui conférer un rôle déterminant dans la régulation de cette ressource stratégique. Reste à savoir si les autres acteurs, industriels et internationaux, suivront la cadence imposée par Kinshasa.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd