À Mbuji-Mayi, la joie suscitée par la modernisation de certaines artères de la ville laisse progressivement place à une vive inquiétude. L’Office des voiries et drainages (OVD) a tiré la sonnette d’alarme face à une pratique devenue monnaie courante : le stockage de sable, de moellons et d’autres matériaux de construction directement sur les routes modernisées. Une situation qui, selon l’entreprise publique, met en péril ces infrastructures routières RDC « chèrement acquises » et compromet leur durabilité.
Dans un message publié sur sa page Facebook, l’OVD Mbuji-Mayi a tenu à rappeler avec insistance la vocation première d’une chaussée. « La route est constituée de couches techniques, notamment de granulats et de bitume, destinées exclusivement à supporter le trafic routier », a martelé l’institution. Transformer l’espace public en aire de dépôt, même temporaire, est donc un contresens technique aux conséquences potentiellement lourdes. Le bitume, conçu pour résister au roulement des pneus, n’est pas armé pour supporter le poids statique et abrasif de tas de matériaux lourds. Combien de temps ces investissements publics pourront-ils tenir si de telles habitudes persistent ?
Les conséquences de ce stockage matériaux routes sont multiples et préoccupantes. Première victime : la circulation gênée Kasaï-Oriental. Les tas de sable ou de pierres empiètent sur la chaussée, rétrécissant les voies de circulation et créant des embouteillages inutiles. Pire, ils constituent des obstacles imprévisibles, surtout la nuit, exposant les usagers à des risques d’accidents graves. Mais le danger est aussi à plus long terme. L’OVD alerte sur une routes modernisées dégradation accélérée. La pression continue exercée par ces matériaux peut fissurer le revêtement, permettant ensuite à l’eau de s’infiltrer et de détériorer les couches de base de la route. Un processus silencieux qui condamnerait prématurément des travaux récents.
Face à cet avertissement, les réactions en ligne des habitants de Mbuji-Mayi révèlent un fossé de perception. Si certains reconnaissent la nécessité de préserver le patrimoine routier, d’autres pointent du doigt les carences qui, selon eux, sont à l’origine du problème. « Comment voulez-vous que les camions déchargent directement dans les parcelles si aucune rampe d’accès n’a été prévue ? », interroge Kamanga Mbuyi, un internaute. Un autre, Danny Daniel, renchérit en rappelant que pour certaines voies, les travaux sont terminés depuis longtemps, mais les fameuses passerelles promises pour faciliter l’accès aux habitations sont toujours aux abonnés absents. Cette absence d’aménagements annexes pousserait ainsi les riverains et les artisans à utiliser la route comme un espace de stockage pratique, faute de solution alternative.
Ce débat met en lumière un enjeu crucial de la gestion urbaine dans les villes congolaises en pleine mutation : la coordination entre les grands travaux et les besoins pratiques du quotidien. Moderniser une route est une chose, mais penser son intégration dans le tissu urbain existant en est une autre. L’appel de l’OVD à la responsabilité citoyenne est légitime et nécessaire. Préserver les infrastructures routières RDC est un impératif pour tous, un investissement collectif pour l’avenir. Cependant, cet appel résonnera-t-il aussi fortement si les pouvoirs publics ne prennent pas en compte les réalités terrain et ne fournissent pas les aménagements qui permettraient aux citoyens de respecter plus facilement les règles ? La route, espace de vie partagé, devient ici le miroir des défis de la co-construction entre l’État et les administrés.
La situation à Mbuji-Mayi pose ainsi une question fondamentale : jusqu’où peut-on demander à une population de s’adapter à une infrastructure qui, parfois, ne s’adapte pas à elle ? La préservation du bien public est une responsabilité partagée, qui nécessite à la fois une sensibilisation efficace et une planification urbaine inclusive. L’alerte de l’OVD Mbuji-Mayi doit être l’occasion d’un dialogue constructif pour trouver des solutions durables, avant que la dégradation ne devienne irréversible et que la colère ne prenne le pas sur la raison.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
