Le calme est revenu ce vendredi 26 décembre à Bule, localité du territoire de Djugu en Ituri, après une matinée marquée par de violentes confrontations. Les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) se sont opposées aux rebelles de la Convention pour la révolution populaire (CRP), mouvement dirigé par l’ancien chef de guerre Thomas Lubanga. Les premières détonations ont retenti dès 7 heures, annonçant une nouvelle escalade de la violence armée dans cette province déjà éprouvée.
Selon des sources locales, le point de départ des hostilités se situait au niveau de la rivière Mbi. C’est à cet endroit que les FARDC auraient reçu des renforts militaires significatifs avant de lancer une offensive d’envergure. L’objectif déclaré de cette opération était clair : reprendre le contrôle total du centre commercial de Bule. Ce point névralgique de l’économie locale est resté partiellement occupé par les éléments de la CRP, une situation intolérable pour les autorités qui cherchent à rétablir la souveraineté de l’Etat.
Les échanges de tirs, tant avec des armes légères que lourdes, ont été d’une intensité rarement vue ces derniers mois. Les affrontements à Bule ont plongé la population dans la terreur, rappelant les heures les plus sombres du conflit en Ituri. Les habitants, pris en étau entre les deux camps, ont cherché refuge où ils pouvaient. L’accalmie constatée en fin de matinée n’a pas suffi à dissiper l’angoisse ni les conséquences immédiates de ces combats.
La société civile locale, par la voix de son président Désiré Malodra, dresse déjà un premier bilan, amer et porteur d’inquiétudes. Un civil a été retrouvé sans vie, victime vraisemblablement de balles perdues lors des intenses échanges de tirs. Un autre a été blessé et a nécessité des soins. Ces victimes innocentes soulignent le lourd tribut payé par les populations civiles, premières touchées par la recrudescence de la violence armée à Djugu. La société civile redoute que ce bilan ne s’alournisse dans les prochaines heures, au gré des découvertes.
La situation humanitaire, déjà précaire, s’est brutalement détériorée. La récurrence des accrochages pousse des familles entières sur les routes de l’exode. Vingt-huit civils, dont neuf enfants et sept femmes, ont ainsi trouvé refuge à la base de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO) à Bule. Ils espèrent y trouver une sécurité que leur propre village ne peut plus leur offrir. Cet afflux de personnes déplacées illustre l’urgence d’une réponse humanitaire coordonnée face à l’instabilité persistante.
La violence n’a pas épargné la communauté internationale présente sur place. La base de la MONUSCO a elle-même été la cible de tirs. Un Casque bleu bangladais déployé dans la région a été touché à l’épaule. L’homme a immédiatement bénéficié de soins médicaux et son état n’inspirerait pas d’inquiétude. Cet incident grave a conduit le commandement onusien à placer la base en état d’alerte maximale, renforçant les dispositifs de sécurité et limitant les mouvements. Comment assurer la protection des civils quand les soldats de la paix sont eux-mêmes pris pour cible ?
Ces événements interviennent dans un contexte sécuritaire régional particulièrement tendu. Le conflit à Djugu, et plus largement en Ituri, reste marqué par la présence de plusieurs groupes armés, dont la CRP de Thomas Lubanga. La détermination affichée par les FARDC à reprendre le contrôle du centre commercial de Bule signale-t-elle un tournant dans la stratégie des forces gouvernementales ? Une volonté de ne plus laisser aucun espace vital aux groupes rebelles, quitte à engager des affrontements frontaux ?
Les prochaines heures seront décisives pour évaluer la portée réelle de cette opération militaire. Le calme précaire qui règne désormais à Bule peut-il tenir ? Les rebelles de la CRP, mis sous pression, vont-ils tenter une contre-offensive ou se replier plus profondément dans la brousse ? Les questions sont nombreuses, les réponses incertaines. Une chose est sûre : la population de Bule vit une nouvelle fois au rythme angoissant des armes, dans l’attente d’une paix durable qui semble toujours s’éloigner.
Cette escalade de violence souligne l’impératif absolu de trouver des solutions politiques durables au conflit en Ituri. Les opérations militaires, si elles sont parfois nécessaires pour rétablir l’ordre, ne suffiront pas à elles seules à éteindre les braises de la violence. Le dialogue, la justice et le développement restent les seuls garants d’une stabilité pérenne pour les populations de Djugu, lassées par des décennies de cycles infernaux de conflits et de tensions.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
