Dans un coup de semonce qui résonne dans les couloirs du Palais du Peuple, le député national Christian Mwando Nsimba a lancé un ultimatum cinglant, exigeant la démission Jean-Pierre Bemba de son poste de vice-Premier ministre et ministre des Transports. Selon l’élu de Kabalo, également président du groupe parlementaire Ensemble, l’incapacité persistante à résoudre les embouteillages Kinshasa et la multiplication des tragiques naufrages RDC sur les cours d’eau nationaux sont la preuve d’une incompétence patente. Cette attaque frontale, formulée sur les ondes de Radio Okapi, marque-t-elle le début d’une offensive parlementaire contre un pilier du gouvernement, ou n’est-elle qu’une salve isolée dans l’arène politique congolaise ?
Jean-Pierre Bemba, figure historique et poids lourd politique, se retrouve ainsi sur la sellette. La critique de Christian Mwando est sans appel : depuis sa prise de fonction à la tête de ce ministère clé pour le désenclavement du pays, les résultats tangibles se font cruellement attendre. Les citoyens de la capitale étouffent quotidiennement dans un chaos routier devenu chronique, pendant que les fleuves et lacs continuent de se transformer en pièges mortels pour des centaines de compatriotes. Le député fustige une gestion qu’il qualifie d’inefficace, posant une question fondamentale : jusqu’à quand la population doit-elle subir les conséquences d’une administration défaillante ?
La réaction du ministère des Transports, par la voix de son secrétaire général Jean-Marie Abolia, a été immédiate et vise à désamorcer la polémique. Abolia a rétorqué que cette déclaration « n’engage que son auteur », soulignant ainsi son caractère personnel et politique. Il a défendu l’action du cabinet, assurant qu’un « travail se fait jour et nuit » pour apporter des réponses urgentes aux problèmes d’embouteillages et de sécurité maritime et fluviale. Selon lui, l’équipe du ministre des Transports RDC œuvre à des « solutions structurelles », laissant entendre que les maux dénoncés sont complexes et hérités d’années de négligence. Mais cette défense institutionnelle suffira-t-elle à calmer la grogne et à restaurer une confiance érodée ?
Cette passe d’armes verbale dépasse le simple échange entre un parlementaire et l’exécutif. Elle met en lumière les tensions latentes au sein de la majorité et interroge sur l’efficacité réelle de la gouvernance sectorielle. Le poste de ministre des Transports est un portefeuille stratégique, souvent perçu comme un tremplin ou un tombeau politique. Jean-Pierre Bemba, en accumulant les fonctions de vice-Premier ministre et de patron des Transports, avait hérité d’une lourde responsabilité avec la promesse implicite de changements visibles. L’absence d’amélioration notable dans la circulation kinoise et la récurrence des drames aquatiques offrent donc un angle d’attaque idéal pour ses détracteurs.
L’analyse des faits révèle un paradoxe saisissant. D’un côté, le ministère évoque des plans et un travail en coulisses pour des solutions durables. De l’autre, la réalité vécue par la population, celle des pertes de temps monstrueuses dans les embouteillages Kinshasa et de la peur constante des naufrages RDC, crie l’urgence et l’échec des mesures palliatives. Ce décalage entre le discours officiel et l’expérience quotidienne des Congolais nourrit la frustration et donne du crédit aux appels comme celui de Christian Mwando. Le ministre joue gros sur ce dossier : son incapacité à produire des résultats rapides et concrets pourrait non seulement fragiliser sa position personnelle au gouvernement, mais aussi entamer la crédibilité de l’action publique dans un secteur vital pour l’économie et la cohésion sociale.
La balle est désormais dans le camp de l’exécutif. La suite des événements dépendra de la capacité de Jean-Pierre Bemba à orchestrer une réponse visible dans les prochains mois. S’agit-il d’une simple tempête dans un verre d’eau politique ou du prélude à une crise plus profonde au sein de la majorité ? La gestion des dossiers des transports et du désenclavement reste un test décisif pour l’autorité du ministre. En attendant, la pression monte, et chaque nouveau bouchon sur les artères de Kinshasa, chaque nouvelle annonce de disparus dans les eaux du Congo, risquent de se transformer en arguments accablants pour ceux qui, comme le député Mwando, réclament déjà son départ. L’épisode illustre la dure loi de la politique congolaise : les promesses de changement doivent rapidement se matérialiser sous peine de se voir transformées en griefs politiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
