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Mazuku à Goma : un gardien asphyxié par le gaz toxique, le sol du Nord-Kivu tue en silence

Un silence de plomb plane sur le quartier Lac Vert, à l’ouest de Goma. Ce mardi 16 décembre, l’asphyxie a encore frappé, subtile et mortelle. Un agent de gardiennage, tentant simplement de récupérer une volaille tombée dans une fosse à Nyabyunyu, a inhalé le souffle froid du « Mazuku ». Il n’est jamais remonté, victime d’un gaz toxique aussi invisible qu’implacable, dans une zone du Nord-Kivu pourtant habitée.

Ce drame individuel n’est malheureusement pas un fait isolé. Il s’inscrit dans une litanie macabre qui jalonne la région. Des dizaines de vies, peut-être même des centaines, ont été fauchées de manière identique, happées par ces poches mortelles de gaz carbonique qui sourdent des entrailles de la terre. En février 2023, c’était l’ancien coordinateur provincial de la Protection civile qui succombait à Bulengo, lui aussi en voulant secourir une dépouille dans une grotte. Le Mazuku, phénomène naturel sournois, transforme des actes du quotidien en pièges mortels. Mais pourquoi ce danger persiste-t-il avec une telle force en République Démocratique du Congo, et particulièrement à Goma ?

La réponse est un cocktail glaçant de fatalité géologique et de carences criantes. Goma est bâtie sur un sol volcanique hyperactif, traversé par des failles qui libèrent en continu du dioxyde de carbone (CO2). Plus dense que l’air, ce gaz toxique s’accumule dans les dépressions du terrain, les caves, les fosses et les grottes, formant des « Mazukus » – un terme local qui signifie littéralement « vent mauvais ». Dans ces cuvettes invisibles, l’oxygène se raréfie jusqu’à disparaître. Un être humain qui y pénètre perd connaissance en quelques secondes, asphyxié sans même un bruit, une véritable trappe géochimique.

Le vrai drame, au-delà du phénomène lui-même, réside dans l’absence criarde de prévention et de signalisation. Comme le souligne Dedesi Mitima, la plupart de ces zones contaminées ne sont tout simplement pas identifiées ou balisées. Les populations vivent au-dessus d’un champ de mines gazeux, ignorant où le sol peut cesser de respirer pour elles. Les quartiers s’étendent, souvent de manière informelle, sans étude préalable des risques géologiques. Chaque nouvelle construction, chaque fosse creusée, devient une potentielle tombe. Cette négligence collective face aux dangers du gaz carbonique à Goma est un scandale en suspens.

Les conséquences sont directes et tragiques. Des familles entières sont décimées, des enfants curieux périssent en jouant, des secouristes bien intentionnés tombent à leur tour. La psychose s’installe lentement dans certaines communautés, où l’on craint les zones basses, les nuits sans vent où le gaz stagne. L’économie informelle, souvent basée sur l’exploitation de carrières ou la recherche d’eau, devient une activité à haut risque. Comment développer une région où le sol lui-même peut vous tuer en silence ?

Face à cette urgence environnementale et humaine, l’appel à l’action est plus que jamais vital. Il ne s’agit pas de déplacer des villes, mais d’apprendre à coexister avec ce risque en le maîtrisant. Des solutions existent : cartographier systématiquement les zones d’émanation grâce à des détecteurs de CO2, implanter un réseau de balises d’alerte visibles, et surtout, mener des campagnes massives de sensibilisation. Il faut expliquer, encore et encore, que le Mazuku n’est pas une malédiction mystique, mais un phénomène physique parfaitement identifiable. Il faut apprendre aux habitants à reconnaître les signes avant-coureurs et les gestes qui sauvent.

La mort de cet agent de gardiennage à Lac Vert est un signal d’alarme de plus, étouffé dans l’indifférence générale. Elle nous rappelle que la menace du Mazuku au Nord-Kivu est un tueur sériel par négligence. Tant que des vies continueront de se perdre dans des fosses non signalées, tant que le gaz toxique à Goma sera traité comme une fatalité et non comme un risque géologique à gérer, nous resterons complices de cette asphyxie programmée. Le sol de Goma exhale un poison. Il est temps, enfin, d’apprendre à lui tenir tête.

Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net

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Miché Mikito
Miché Mikito
Né au bord du majestueux fleuve Congo, à Kisangani, Miché Mikito vous propose une couverture sportive dynamique et un éclairage unique sur les enjeux environnementaux. Passionné de sport, il suit de près les compétitions locales et internationales tout en restant très attentif à la préservation des richesses naturelles du Congo. Miché est votre guide pour tout ce qui concerne le sport et l’environnement.
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