Dans un contexte économique asphyxié par des années de conflit, un appel pressant vient de résonner dans les couloirs du pouvoir à Kinshasa. Le député national et ancien gouverneur du Nord-Kivu, Carly Nzanzu Kasivita, a officiellement interpellé la Première ministre, Judith Suminwa Tuluka, pour demander la prorogation des mesures d’allègements fiscaux dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Cette requête, formulée par lettre, souligne l’urgence d’un soutien continu à des économies régionales laminées par l’insécurité et l’instabilité.
Le parlementaire, élu du territoire de Beni, plaide spécifiquement pour la reconduction du décret n°24/17 du 21 novembre 2024. Ce texte, pierre angulaire d’une politique de soutien aux opérateurs économiques, accordait des allégements en matière fiscale, douanière et de recettes non fiscales. Une bouffée d’oxygène temporaire pour des entreprises naviguant en eaux troubles depuis la proclamation de l’état de siège. Carly Nzanzu réclame également le renouvellement de la suspension de la TVA à l’importation et à la vente pour des secteurs clés comme la cimenterie et l’immobilier, des piliers essentiels pour la reconstruction et le développement.
Mais pourquoi cette demande est-elle si cruciale aujourd’hui ? La réponse de l’élu est sans équivoque : « La guerre, qu’il s’agisse de l’agression rwandaise ou de l’insécurité causée par les groupes armés locaux et étrangers, notamment les ADF, a un impact très négatif sur les affaires, les investissements et les conditions de vie des populations ». Ce constat fait écho à une réalité économique déprimée où l’investissement privé hésite et où le coût de la vie s’envole. Les mesures fiscales de 2024 représentaient ainsi une digue fragile contre une marée montante de difficultés.
L’analyse des chiffres avancés par le député est édifiante et révèle les limites de l’application du décret. Dans le secteur des hydrocarbures, vital pour le transport et l’activité économique, la taxe sur les carburants au Nord-Kivu serait passée de 1 000 à 3 000 dollars, une augmentation de 200 % en contradiction flagrante avec l’esprit des allègements fiscaux. En Ituri, la parafiscalité sur les mêmes produits aurait grimpé de 1 000 à 1 500 dollars. Ces dérives tarifaires illustrent un phénomène de contournement des textes qui annule leurs effets bénéfiques et alourdit directement le fardeau porté par les consommateurs et les entrepreneurs.
La situation actuelle pose une question fondamentale de politique économique en période de crise prolongée. Faut-il considérer ces allègements fiscaux Nord-Kivu et Ituri comme une aide d’urgence temporaire, ou bien comme un outil structurel de redynamisation d’un territoire en convalescence ? L’argument de Carly Nzanzu penche clairement pour la seconde option. « Nous demandons la reconduction de ce décret, car la situation demeure inchangée », affirme-t-il. En d’autres termes, tant que les causes profondes de la crise – l’insécurité et l’agression – persisteront, le traitement symptomatique par la fiscalité doit se poursuivre.
L’enjeu dépasse la simple comptabilité publique. Il touche à la crédibilité de l’État et à sa capacité à maintenir un tissu économique viable dans l’Est du pays. La non-prorogation des mesures fiscales état de siège RDC enverrait un signal négatif aux acteurs économiques qui tentent de résister, accréditant l’idée d’un abandon de ces régions à leur sort. À l’inverse, une reconduction, couplée à un mécanisme de contrôle renforcé pour éviter les dérapages tarifaires, pourrait préserver des emplois, contenir l’inflation sur les biens de première nécessité et empêcher une fuite massive des capitaux.
À l’heure où les budgets des ménages sont soumis à une pression extrême, la décision du gouvernement sera donc scrutée à la loupe. Elle définira, pour les mois à venir, la trajectoire de l’économie Nord-Kivu Ituri. Le plaidoyer de Carly Nzanzu met en lumière une équation complexe : comment concilier les besoins budgétaires nationaux avec l’impératif de soutenir des économies régionales exsangues ? La réponse à cette question déterminera si les populations de l’Est pourront simplement survivre, ou commencer à entrevoir les prémices d’une véritable relance.
La balle est désormais dans le camp de l’exécutif. La lettre du député, tel un électrochoc, rappelle que derrière les chiffres du décret allégements fiscaux RDC, il y a des commerçants, des transporteurs, des bâtisseurs et des familles entières dont la résilience est mise à rude épreuve. L’acte II de la politique de soutien fiscal se joue maintenant, et ses répercussions seront capitales pour la stabilité et le futur développement de ces provinces meurtries.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
