Le visage creusé par l’épuisement et le chagrin, Matondo, rescapé du naufrage, se tient sur la berge boueuse d’Inongo. « C’était l’enfer. Le vent a grondé, le bateau a tangué, et puis l’eau est entrée de partout. Les cris… Je ne les oublierai jamais. » Son témoignage glaçant résume le drame qui a frappé le lac Mai-Ndombe ce jeudi 27 novembre, un accident maritime qui a une nouvelle fois ensanglanté les eaux congolaises. Le bilan, désormais définitif, est lourd : 23 vies fauchées et 83 personnes arrachées aux flots, sur une embarcation qui en transportait environ 110. Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi ces tragédies se répètent-elles inlassablement sur nos voies navigables ?
L’embarcation, une baleinière partie du territoire de Kiri à destination de Kinshasa, a chaviré à une centaine de kilomètres d’Inongo, le chef-lieu de la province. Le scénario est malheureusement classique : un ouragan soudain, une vague traîtresse, et la panne d’un des moteurs. À 16 heures précises, le bateau, naviguant déjà à vue dans des conditions périlleuses, a sombré. Trois jours de recherches intenses ont été nécessaires pour localiser les corps et établir le bilan naufrage RDC novembre. Aujourd’hui, l’épave est toujours visible, macabre rappel à la surface du lac, interrogeant tous les passants sur la sécurité des traversées.
Le gouverneur de la province, Nkoso Kevani, a annoncé la fin des opérations de recherche. « Tous les rescapés ont pu regagner leurs milieux de provenance grâce à une baleinière mise à disposition par le gouvernement provincial », a-t-il déclaré. Si les opérations de sauvetage sont closes, les questions, elles, demeurent brûlantes. L’ampleur des dégâts matériels reste d’ailleurs indéterminée, les marchandises embarquées n’ayant pas encore été évaluées. Cette opacité, fréquente après ce type de drame, nourrit l’incompréhension et la colère des familles des victimes naufrage Inongo. Que transportait ce bateau ? Était-il surchargé ? Les règles élémentaires de navigation ont-elles été respectées ?
Derrière les chiffres froids du bilan se cachent des réalités sociales criantes. Ces baleinières sont souvent l’unique lien économique pour des communautés entières, condamnées à prendre des risques quotidiens par manque d’alternatives. Le transport lacustre, vital pour l’approvisionnement et les échanges, se fait au mépris des normes les plus élémentaires. Surcharge, vétusté des embarcations, équipements de sauvetage inexistants et météo imprévisible : le cocktail est explosif. Ce naufrage lac Mai-Ndombe n’est pas une fatalité, mais le symptôme d’un abandon chronique des infrastructures et de la sécurité navigation lac Mai-Ndombe.
Les autorités promettent régulièrement des audits et des mesures après chaque catastrophe. Pourtant, les rapports s’empilent et les drames se succèdent. La population, elle, est prise en étau entre la nécessité de se déplacer et la peur de monter à bord de ces cercueils flottants. Quand l’État assurera-t-il enfin sa mission régalienne de protection des citoyens, même sur l’eau ? La mise en place d’un contrôle strict de la navigabilité, de la formation des pilotes et de services météorologiques efficaces relève de l’urgence absolue.
Ce nouveau drame doit sonner comme un électrochoc. Il ne s’agit plus de compter les morts, mais d’honorer leur mémoire en agissant concrètement. Chaque vie perdue dans les eaux du Congo est un échec collectif. La sécurité maritime n’est pas un luxe, c’est un droit fondamental. Tant que la priorité ne sera pas donnée à la vie humaine plutôt qu’au profit immédiat et à la précipitation, le lac Mai-Ndombe et bien d’autres cours d’eau continueront de porter le deuil de leurs enfants. Le véritable bilan de ce naufrage se mesure à la détermination qui en suivra pour que cela ne se reproduise plus jamais.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
