Le paysage bancaire congolais se prépare à une métamorphose institutionnelle d’envergure, alors que le Sénat a adopté ce jeudi 27 novembre la proposition de loi modifiant la législation régissant l’activité et le contrôle des établissements de crédit. Cette adoption en seconde lecture intervient dans un contexte de divergence notable avec la chambre basse, créant un suspense politique autour de cette réforme bancaire en RDC qui ambitionne de moderniser un secteur financier en quête de stabilité.
La tension législative se cristallise autour d’un seul article – l’article 190 – mais son importance stratégique n’échappe à aucun observateur averti. Ce dispositif crucial concerne le délai accordé aux établissements bancaires pour se conformer aux nouvelles exigences réglementaires. Le député initiateur Olivier Katuala proposait initialement une période de transition de 120 mois, que l’Assemblée nationale avait ramenée à 60 mois en première lecture. Le Sénat, dans un mouvement de rigueur accrue, a jugé nécessaire de réduire davantage ce délai à 36 mois, créant ainsi un imbroglio parlementaire qui devra être résolu par une commission mixte paritaire.
Cette modification de la loi sur les établissements de crédit représente-t-elle une simple adaptation technique ou constitue-t-elle une refonte profonde du cadre réglementaire bancaire ? Les initiateurs du texte défendent une vision modernisatrice, arguant que la législation actuelle présente des lacunes préjudiciables à la pérennité des institutions financières. « Les exigences relatives à la dilution du capital social et à la nationalité des dirigeants semblent fragiliser nos institutions financières, au lieu de les fortifier », plaide le député Katuala, soulignant le décalage entre les normes congolaises et les standards régionaux.
La réforme bancaire RDC se donne pour objectif principal de privilégier le respect des règles de gouvernance existantes plutôt que la dilution du capital, instaurant des mécanismes de surveillance renforcés incluant des conseils d’administration compétents, des comités spécialisés et des audits externes réguliers. Cette approche vise à prévenir les effets contraignants de l’obligation actuelle de dilution du capital entre au moins quatre actionnaires, chacun devant détenir au minimum 15%.
Le parcours législatif de cette proposition démontre l’importance accordée par les institutions congolaises à cette modification de la législation bancaire. Après son dépôt le 16 septembre 2024, l’Assemblée nationale avait déclaré le texte recevable le 12 décembre suivant, le confiant à la Commission économique, financière et du contrôle budgétaire pour un examen approfondi de six mois. L’adoption en séance plénière le 15 juin 2025, avec 354 voix pour, 1 contre et 8 abstentions sur 363 votants, témoignait d’un large consensus sur le principe de la réforme.
Le Sénat RDC, dans sa sagesse institutionnelle, a cependant estimé nécessaire de durcer les conditions de mise en œuvre, adoptant le texte le 27 novembre avec 73 voix pour et une abstention sur 74 votants. Cette divergence ouvre maintenant la voie à une phase de conciliation dont l’issue reste incertaine. La Constitution congolaise, dans son article 113 alinéa 2, prévoit que en cas d’échec de la commission mixte paritaire, la version de l’Assemblée nationale prévaudra, sous réserve du droit du Président de la République de demander une nouvelle délibération.
Ce délai de conformité pour les banques devient ainsi l’enjeu d’un bras de fer institutionnel dont les implications dépassent largement le simple calendrier technique. La question fondamentale reste : comment concilier nécessaire adaptation des établissements bancaires et impératif de mise en œuvre rapide d’une réforme attendue ? La réponse apportée par les instances politiques congolaises dessinera certainement l’avenir du secteur financier national pour les prochaines années.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
