La République Démocratique du Congo opère un virage diplomatique significatif avec la visite d’État du président Félix Tshisekedi en Serbie. Ce déplacement de trois jours à Belgrade, entamé ce jeudi 27 novembre, symbolise la volonté congolaise de diversifier ses partenariats stratégiques dans un contexte international de plus en plus compétitif. Le Chef de l’État, accompagné de la Première Dame Denise Nyakeru Tshisekedi, a été accueilli avec les honneurs protocolaires par le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur serbe, marquant l’importance que les deux capitales accordent à ce rapprochement bilatéral.
Cette visite Tshisekedi Serbie s’inscrit dans la continuité des discussions entamées en marge de la 79ᵉ Assemblée générale des Nations unies en septembre 2024. Les deux dirigeants avaient alors exprimé leur intention commune de renforcer les relations d’amitié et de coopération entre Kinshasa et Belgrade. La diplomatie congolaise semble ainsi vouloir jouer sur plusieurs tableaux, cherchant à établir des partenariats multiples dans un monde où les alliances traditionnelles montrent leurs limites. La RDC parviendra-t-elle à tirer profit de cette nouvelle orientation stratégique ?
Les enjeux économiques sous-tendent cette démarche diplomatique. La Serbie, dont l’économie connaît une croissance soutenue malgré des défis persistants comme l’inflation et le déficit commercial, représente un partenaire potentiel pour le développement congolais. Les discussions bilatérales devraient aboutir à la signature de plusieurs protocoles d’accord couvrant des domaines aussi variés que l’éducation, l’agriculture, les sports, les mines, ainsi que la coopération en matière de lutte contre la criminalité et le blanchiment des capitaux. Cette diversification des champs de collaboration témoigne d’une approche holistique des relations bilatérales RDC.
Pendant ce temps, sur le front domestique, le ministre des Mines Louis Watum dresse un constat sévère : après près d’un siècle d’exploitation minière, les Congolais n’ont toujours pas profité de leurs richesses. Cette amère observation, formulée lors d’un briefing presse conjoint avec le porte-parole du gouvernement Patrick Muyaya, souligne les défis immenses auxquels fait face le secteur extractif congolais. Le ministre a présenté ses priorités pour inverser cette tendance historique, incluant le renforcement de la bonne gouvernance, la traçabilité des minerais, la lutte contre la fraude minière et l’encadrement de l’artisanat minier.
Ces réformes ambitieuses s’inscrivent dans la vision du président Tshisekedi qui souhaite transformer le secteur minier en moteur de développement durable et en levier de justice sociale. La concomitance entre cette volonté de réforme interne et l’ouverture de nouveaux horizons diplomatiques n’est probablement pas fortuite. La coopération RDC Serbie pourrait-elle apporter des solutions innovantes aux défis miniers congolais ? Les experts s’interrogent sur les potentialités de transfert de technologie et de savoir-faire que pourrait générer ce nouveau partenariat.
Le président Tshisekedi joue ainsi sur deux échiquiers simultanés : international par le biais de cette diplomatie active cherchant à élargir le cercle des partenaires de la RDC, et national par la mise en œuvre de réformes structurelles dans un secteur-clé de l’économie. Cette double stratégie, si elle porte ses fruits, pourrait marquer un tournant décisif dans le développement du pays. Cependant, le chemin reste semé d’embûches, entre la complexité des négociations internationales et la résistance des intérêts établis dans le secteur minier.
La réussite de cette visite à Belgrade et la mise en œuvre effective des réformes minières constitueront des indicateurs majeurs de la capacité du gouvernement à concrétiser ses ambitions affichées. Les mois à venir seront cruciaux pour déterminer si ces annonces se traduiront par des bénéfices tangibles pour les populations congolaises, ou si elles rejoindront le long catalogue des promesses non tenues. La crédibilité de l’exécutif congolais se joue en partie dans sa capacité à faire de ces relations bilatérales RDC un levier de développement concret.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
