La lutte contre la désinformation en santé devient une priorité absolue dans la province de la Tshopo, où la Division provinciale de la Santé a initié un atelier désinformation santé crucial les 25 et 26 novembre dernier. Cet événement, soutenu techniquement et financièrement par l’Organisation mondiale de la Santé, vise à armer les acteurs médiatiques et influenceurs sociaux contre la propagation de fausses informations qui ont déjà causé des drames humains dans la région.
Comment une simple rumeur peut-elle transformer des citoyens en meurtriers ? La question mérite d’être posée après le drame survenu à Isangi en octobre dernier, où des agents de santé ont perdu la vie suite à des rumeurs santé Tshopo concernant la disparition supposée d’organes génitaux masculins. Ce tragique événement a servi de déclencheur à cette initiative de formation d’envergure, reconnaît le Dr Willybaard Kowengbia, chef du sous-bureau de OMS Kisangani.
« La gestion de l’infodémie fait partie du mandat direct de l’OMS et, plus largement, de l’ensemble du système des Nations Unies », a souligné le représentant de l’organisation onusienne. Son message aux participants était clair : « Vous, journalistes issus de nos médias locaux, et vous, influenceurs suivis par des milliers de jeunes sur Facebook, TikTok ou WhatsApp, vous êtes devenus des acteurs essentiels de la santé publique ».
Le programme de cet atelier a été spécialement conçu pour répondre aux défis locaux. Au menu : analyse approfondie des mécanismes de propagation des rumeurs, techniques de vérification des sources d’information, utilisation d’outils numériques spécialisés et gestion responsable des données sanitaires. L’objectif ultime ? Équiper ces « sentinelles de l’information » pour qu’ils puissent détecter, analyser et contrer rapidement les fausses nouvelles avant qu’elles ne fassent des victimes.
Mais pourquoi la désinformation sanitaire est-elle particulièrement dangereuse en RDC ? La réponse réside dans la combinaison entre faible couverture médiatique professionnelle dans certaines zones rurales, méfiance historique envers le système de santé et viralité exponentielle des messages sur les réseaux sociaux. Ces facteurs créent un terrain fertile pour la propagation de rumeurs qui peuvent entraîner des actes de violence personnel soignant parfois mortels.
L’approche pédagogique de l’atelier insiste sur la nécessité d’une communication responsable santé RDC. Il ne s’agit pas seulement de démentir les fausses informations, mais de comprendre pourquoi elles émergent, comment elles se propagent et quelle réponse appropriée apporter pour apaiser plutôt qu’enflammer l’opinion publique. Les participants ont été invités à réfléchir à leur rôle dans la chaîne de l’information et leur responsabilité dans la protection des vies humaines.
À l’issue de ces deux jours de formation intensive, l’OMS et la Division provinciale de la Santé ambitionnent de mettre en place un réseau provincial d’éveil médiatique. Cette structure permettra aux différents acteurs de travailler en synergie pour anticiper et répondre collectivement aux crises informationnelles. Imaginez un système d’alerte précoce où journalistes, influenceurs et autorités sanitaires collaborent pour désamorcer les bombes informationnelles avant qu’elles n’explosent.
Cette initiative arrive à point nommé alors que la région fait face à plusieurs défis sanitaires simultanés. Entre les campagnes de vaccination, la lutte contre le paludisme et la préparation aux épidémies, la confiance des populations envers le système de santé constitue un élément clé du succès des interventions médicales. Chaque rumeur qui érode cette confiance représente un obstacle supplémentaire dans la bataille pour la santé publique.
Les participants sont repartis avec une mission claire : devenir des ambassadeurs de l’information vérifiée dans leurs sphères d’influence respectives. Leur travail quotidien consistera désormais à non seulement informer, mais aussi à éduquer leur audience sur l’importance de croiser les sources et de résister à la tentation du partage impulsif.
La leçon à retenir est simple mais vitale : dans le domaine de la santé, une information non vérifiée peut tuer aussi sûrement qu’une maladie. L’atelier de Kisangani représente donc un investissement dans la prévention des crises sanitaires futures, démontrant que la lutte pour la santé publique passe aussi par une bataille pour la vérité.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
