Dans un contexte politique congolais marqué par des tensions persistantes, l’Alliance pour le dialogue inclusif et la réconciliation (ADIR) lance une offensive citoyenne singulière. Cette structure, qui se présente comme un fer de lance de la société civile, a inauguré lundi dernier à Kinshasa une vaste campagne de pétition visant à imposer la tenue d’un dialogue national inclusif entre l’ensemble des forces vives de la nation.
Cette initiative s’inscrit dans le sillage des efforts déjà déployés par les confessions religieuses pour le retour de la paix en République Démocratique du Congo, particulièrement dans les provinces orientales déchirées par les conflits. Mais au-delà de l’alignement stratégique, ADIR pointe du doigt l’échec systémique des mécanismes de résolution de crise actuels.
Priss Mwadi, coordonnateur et porte-parole d’ADIR, ne mâche pas ses mots pour décrire l’impasse actuelle. « Le processus de négociation entamé par notre gouvernement et la signature des différents accords souffrent d’une crise de confiance entre les signataires, la classe politique non impliquée et la société civile », affirme-t-il avec une franchise décapante. Cette analyse sans concession soulève une question fondamentale : comment prétendre résoudre les crises congolaises avec des instruments politiques déjà discrédités ?
La position d’ADIR repose sur un constat implacable : les nombreux accords signés par le Gouvernement n’ont pas produit les résultats escomptés en raison de leur manque d’inclusivité. Cette approche segmentée de la résolution des conflits aurait atteint ses limites, incapable d’endiguer des fléaux aussi divers que le phénomène Mobondo, le banditisme urbain ou la corruption à grande échelle.
L’organisation estime que seule une large concertation nationale peut permettre de faire face aux crises sécuritaires multidimensionnelles qui minent le pays. Cette conviction s’ancre dans l’idée que la complexité des défis requiert une réponse collective, dépassant les clivages politiques traditionnels et les logiques d’appareil.
Fait notable : tout en soutenant la feuille de route des confessions religieuses « 5OSSC » pour la paix et le vivre-ensemble dans la région des Grands Lacs, ADIR choisit d’emprunter une voie complémentaire. La pétition représente une stratégie de pression citoyenne inédite, visant à créer un rapport de force favorable à la convocation d’un dialogue national par le chef de l’État.
Cette approche soulève plusieurs interrogations stratégiques. Le pouvoir en place acceptera-t-il de se soumettre à cette injonction citoyenne ? La société civile parviendra-t-elle à mobiliser suffisamment de signatures pour crédibiliser sa démarche ? Et surtout, un éventuel dialogue national inclusif saura-t-il éviter les écueils qui ont caractérisé les tentatives précédentes ?
La réponse à ces questions déterminera largement l’issue de cette initiative audacieuse. Si ADIR réussit son pari, elle pourrait imposer une nouvelle grammaire politique dans la gestion des crises congolaises. Dans le cas contraire, la crise de confiance dénoncée par Priss Mwadi risque de s’aggraver, creusant encore le fossé entre gouvernants et gouvernés.
Le succès de cette pétition dépendra de la capacité d’ADIR à fédérer au-delà des cercles habituels de la contestation politique. La mobilisation populaire qu’elle appelle de ses vœux constituera le premier test de crédibilité de cette initiative. Reste à savoir si la population, souvent désabusée par les promesses non tenues, répondra présente à cet appel.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
