La province de l’Ituri, longtemps éprouvée par des conflits intercommunautaires persistants, se trouve à un carrefour décisif de son histoire. Les acteurs locaux du territoire d’Irumu viennent de lancer un appel pressant au gouvernement central, soulignant l’impérieuse nécessité d’une implication étatique renforcée dans les processus de dialogue en cours. Cet appel, formulé lors d’un forum d’engagement politique organisé par Mercy Corps, traduit une attente grandissante face aux promesses de stabilisation.
Le gouvernement congolais joue-t-il suffisamment son rôle dans ces dialogues paix Ituri qui détermineront l’avenir de la région? La question mérite d’être posée, alors que les communautés locales multiplient les initiatives de réconciliation. Le forum, financé par le gouvernement britannique, a réuni l’ensemble des forces vives de la province: chefs coutumiers, leaders communautaires, responsables étatiques et représentants de la societé civile Ituri. Ensemble, ils ont procédé à un examen minutieux des résolutions adoptées lors des précédentes consultations, particulièrement sur les questions épineuses des litiges fonciers et des conflits de limites territoriales.
Jean-Baptiste Kato, coordonnateur de la société civile de Babelebe, dresse un bilan nuancé de la situation actuelle. «Aujourd’hui, c’est une très bonne chose parce que les gens se fréquentent, chose qui n’arrivait plus avant. Dans le groupement Tondabo, par exemple, vous trouverez des membres de la communauté Hema exerçant leurs activités sans problème, et vice-versa. C’est un progrès que nous saluons.» Cette amélioration des relations intercommunautaires représente-t-elle pour autant une victoire définitive contre les conflits communautaires RDC qui ont ensanglanté la région?
L’ONG Mercy Corps, par ce forum dédié à la stabilisation Ituri, entend transformer les recommandations issues des dialogues intracommunautaires en actions concrètes. L’objectif affiché: renforcer durablement la confiance entre communautés et autorités locales, condition sine qua non pour prévenir la résurgence des tensions. Mais cette ambition peut-elle réellement se concrétiser sans un engagement plus visible de l’État congolais?
Balidja Kisembo, notable de la chefferie de Bahema Boga, ne mâche pas ses mots: «Il faut résoudre pacifiquement les conflits, éradiquer le phénomène des groupes armés et mettre fin à l’activisme des rebelles ADF.» Son intervention souligne l’urgence d’une approche multidimensionnelle combinant résolution des conflits ancestraux et lutte contre les menaces sécuritaires contemporaines.
Le forum paix Mercy Corps représente-t-il le catalyseur tant attendu d’une paix durable en Ituri? Si les progrès enregistrés sont indéniables, la fragilité de la situation exige une vigilance constante. La véritable question qui se pose désormais est de savoir si le gouvernement congolais saura saisir cette opportunité historique pour consolider les avancées accomplies et prévenir toute rechute dans la violence.
Les communautés de l’Ituri attendent désormais des actes concrets qui traduiront la volonté politique affichée. La balle est dans le camp des autorités nationales, qui devront démontrer leur capacité à transformer les paroles en réalisations tangibles. L’enjeu dépasse largement le cadre provincial: il s’agit de prouver que l’État congolais peut effectivement garantir la sécurité et la stabilité sur l’ensemble de son territoire.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
