La proposition de Martin Fayulu d’organiser un dialogue national inclusif continue de susciter des réactions contrastées au sein de la classe politique congolaise. Dans un contexte de crise sécuritaire persistante dans l’Est du pays, cet appel patriotique révèle les profondes divergences stratégiques qui traversent la majorité présidentielle.
Dieudonné N’kishi, président du parti Congo Positif et figure éminente de l’Union sacrée, a exprimé mercredi des réserves substantielles quant à la pertinence d’un tel dialogue. Son positionnement interroge : comment expliquer cette réticence au sein même de la mouvance présidentielle ? L’initiateur du Front anti-dialogue semble jouer une partition subtile, entre allégeance affichée et désaccord stratégique assumé.
« Je salue l’engagement patriotique de Martin Fayulu, mais je ne partage pas l’idée qu’un dialogue national soit la solution à la crise dans l’Est », a déclaré N’kishi lors de son passage dans l’émission « Dialogue entre Congolais ». Cette déclaration, apparemment mesurée, constitue en réalité une remise en cause fondamentale de l’approche préconisée par l’opposant historique. Le président de Congo Positif privilégie des « actions concrètes » aux « forums politiques sans lendemain », un discours qui trouve certainement écho auprès d’une population lasse des concertations stériles.
La crise sécuritaire dans l’Est RDC nécessite-t-elle vraiment un nouveau dialogue national ? La question mérite d’être posée, tant les précédentes initiatives ont montré leurs limites. N’kishi, en tacticien avisé, pointe du doigt l’inefficacité potentielle d’une énième table ronde tandis que les populations continuent de souffrir dans les provinces en proie à l’insécurité.
Pourtant, le leader de Congo Positif reconnaît certains mérites au plaidoyer de Fayulu, notamment sur la défense de l’intégrité territoriale et la mobilisation de la jeunesse congolaise. Cette approche nuancée démontre une certaine habileté politique : critiquer le remède tout en validant partiellement le diagnostic. Son soutien à la dénonciation des « accords signés sans transparence » constitue un message à double détente, susceptible de résonner bien au-delà de son camp politique.
La réaction de Dieudonné N’kishi s’inscrit dans une stratégie plus large du Front anti-dialogue, qui semble gagner en influence au sein de l’Union sacrée. Ce positionnement interroge sur l’existence possible de lignes de fracture au sein de la majorité présidentielle concernant la gestion de la crise sécuritaire. Le gouvernement parviendra-t-il à maintenir une unité de façade face à des défis aussi pressants ?
L’épisode révèle également les limites de l’opposition traditionnelle. Martin Fayulu, en lançant cet appel, cherche visiblement à repositionner le débat sur le terrain de l’unité nationale. Mais face à la résistance d’acteurs comme N’kishi, sa proposition risque de rester lettre morte, victime des calculs politiciens et des rivalités intestines.
La balle est désormais dans le camp de l’exécutif, qui devra trancher ce dilemme cornélien : organiser un dialogue national inclusif susceptible d’être perçu comme un aveu d’impuissance, ou persister dans l’approche sécuritaire actuelle malgré ses résultats mitigés. La réponse à cette question déterminera certainement l’évolution politique des prochains mois en République Démocratique du Congo.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
