L’Entreprise Générale du Cobalt (EGC) a officiellement lancé ce jeudi 13 novembre sa première production de cobalt artisanal certifié légal, éthique et traçable. Cette initiative historique, déployée dans la province du Lualaba, représente un tournant décisif dans la gouvernance minière congolaise et positionne la RDC comme acteur responsable dans la chaîne d’approvisionnement mondiale des minerais stratégiques.
Les 1 000 tonnes produites constituent-elles simplement une étape symbolique ou marquent-elles véritablement l’émergence d’un nouveau paradigme économique ? La réponse semble s’imposer d’elle-même lorsqu’on considère l’ampleur des enjeux. Ce volume initial, bien que modeste à l’échelle de la production nationale, représente la concrétisation opérationnelle d’un modèle inédit en Afrique, combinant rigueur administrative, responsabilité sociale et exigence environnementale.
Le secteur artisanal, qui emploie directement entre 1,5 et 2 millions de Congolais et fait vivre indirectement plus de 10 millions de personnes, connaît ainsi sa première formalisation structurelle. Cette transition vers l’économie formelle permet de résoudre l’épineuse équation entre activité économique vitale pour les populations et nécessité de régulation pour l’État. Pendant des années, l’informalité persistante de ce segment générait d’importantes pertes fiscales et entravait le développement d’une filière minière intégrée et compétitive.
« Notre vision est claire : transformer le cobalt artisanal en une fierté nationale et un actif stratégique sous contrôle congolais », a déclaré Éric Kalala, Directeur Général de l’EGC. Cette ambition dépasse largement le cadre de la simple commercialisation pour embrasser une approche holistique incluant la transformation locale, le renforcement des capacités des coopératives minières et l’établissement de revenus stables et équitables pour les creuseurs.
L’événement « 1 000 Tonnes d’Avenir » organisé à Kolwezi symbolise cette volonté politique affirmée de reprendre le contrôle d’un secteur stratégique. Comment la RDC pourrait-elle autrement capter la valeur ajoutée de ses ressources minérales sans maîtriser l’ensemble de la chaîne de valeur ? La question trouve désormais une réponse opérationnelle grâce au modèle EGC, qui assure la traçabilité complète depuis le site d’extraction jusqu’à l’usine de transformation.
Les implications économiques de cette initiative sont considérables. L’Agence Internationale de l’Énergie anticipe une croissance de 40% de la demande mondiale de cobalt d’ici 2030, principalement tirée par les besoins de la transition énergétique. Les constructeurs automobiles et électroniques, soumis à une pression réglementaire croissante, exigent désormais des garanties solides sur l’origine éthique et environnementale de leurs approvisionnements. Le modèle EGC répond précisément à cette double exigence : sécuriser les ressources critiques tout en garantissant leur conformité aux standards ESG internationaux.
La réussite de cette première production dans la mine artisanale Lualaba démontre la capacité de l’État congolais à structurer une filière formelle et compétitive. Cette avancée s’inscrit dans le cadre plus large des réformes engagées par les autorités congolaises, notamment avec la reprise de contrôle du secteur des minerais stratégiques par l’ARESCOM en octobre 2025. Ces mesures courageuses participent à l’assainissement global du secteur minier et renforcent la crédibilité internationale de la RDC.
L’EGC, créée en 2019 par l’État congolais et la Gécamines, se positionne ainsi comme un instrument de souveraineté économique. Son mandat dépasse la simple commercialisation pour englober l’organisation, l’achat, la transformation et la valorisation de tous les minerais stratégiques issus de la production artisanale. Cette approche intégrée constitue une rupture stratégique avec le modèle traditionnel d’exportation de matières premières brutes.
La valeur économique générée par cette nouvelle EGC production cobalt ne se limite pas aux revenus d’exportation. Elle inclut également la création d’emplois formels, le développement de compétences locales, la formalisation des activités économiques annexes et l’amélioration des conditions de vie des communautés minières. Cette dimension sociale et humaine représente un levier essentiel pour le développement durable des régions productrices.
Les investisseurs internationaux, longtemps réticents face aux risques liés à l’approvisionnement en cobalt artisanal, disposent désormais d’une alternative crédible et structurée. La traçabilité garantie par l’EGC élimine les incertitudes tout en assurant la conformité aux réglementations internationales sur le devoir de diligence. Cette transparence opérationnelle constitue un avantage compétitif déterminant sur les marchés globaux.
La réussite de cette première production ouvre des perspectives prometteuses pour l’ensemble du secteur minier artisanal congolais. Le modèle développé par l’EGC pourrait servir de référence pour d’autres minerais stratégiques, permettant à la RDC d’affirmer sa position de leader dans la gouvernance responsable des ressources minérales. Cette évolution s’aligne parfaitement avec la vision présidentielle de souveraineté minière, transformant progressivement la RDC d’un simple fournisseur de matières premières en un acteur complet de la chaîne mondiale des minerais critiques.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
