La plus haute juridiction administrative de la République Démocratique du Congo a marqué son entrée dans l’année judiciaire 2025-2026 par une cérémonie solennelle qui a réuni l’ensemble des acteurs majeurs du système judiciaire congolais. Le Palais du Peuple a servi de cadre à cette audience publique présidée par le Président de la République Félix-Antoine Tshisekedi, démontrant l’importance accordée par le pouvoir exécutif à cette institution clé de l’État de droit.
Trois interventions majeures ont rythmé cette rentrée judiciaire du Conseil d’État RDC, chacune abordant des aspects fondamentaux de la réforme de la justice administrative au Congo. Le bâtonnier national a ouvert le bal des prises de parole en plaidant avec force pour l’instauration de la gratuité de la justice dans les contentieux où l’administration publique est mise en cause. Cette proposition audacieuse vise particulièrement les dossiers sensibles relatifs aux démolitions de constructions anarchiques et aux expropriations pour cause d’utilité publique, où les justiciables se trouvent souvent en situation de vulnérabilité financière face à la puissance publique.
Le procureur général près le Conseil d’État, Jean Paul Mukolo Nkokesha, a pour sa part dressé un constat sévère concernant les dérives procédurales observées dans le contentieux administratif congolais. Il a dénoncé avec vigueur l’usage abusif et répété de la procédure de référé, mécanisme initialement conçu pour les situations d’urgence mais détourné de sa finalité originelle. Le magistrat a insisté sur la nécessité impérieuse de mettre en place des mécanismes de filtrage plus rigoureux pour encadrer ces recours, garantissant ainsi une meilleure administration de la justice tout en préservant l’efficacité de l’institution.
La première présidente du Conseil d’État, Brigitte Nsensele wa Nsensele, a centré son discours sur l’importance cruciale du recours administratif préalable, pierre angulaire de tout contentieux administratif efficace. Comment cette institution peut-elle concilier célérité et qualité de la justice tout en réduisant les abus souvent décriés dans les procédures administratives ? La magistrate a esquissé des pistes de réflexion pour une administration judiciaire plus performante, capable de répondre aux attentes légitimes des justiciables tout en respectant les impératifs de l’action publique.
Dans une allocution remarquée, la première présidente a salué la décision historique du Chef de l’État Félix Tshisekedi d’avoir nommé, pour la première fois dans les annales judiciaires congolaises, une femme à la tête de cette haute juridiction administrative. Cette nomination symbolise-t-elle une nouvelle ère pour la parité dans les institutions judiciaires congolaises ? Elle constitue en tout cas un signal fort en matière de promotion de l’égalité des genres au plus haut niveau de l’appareil judiciaire.
Créé par ordonnance présidentielle, le Conseil d’État se positionne comme le gardien suprême de la légalité administrative en RDC. Ses missions fondamentales couvrent le jugement des contentieux administratifs, la production d’avis juridiques destinés au gouvernement et au parlement, ainsi que la supervision de la gestion de 42 tribunaux administratifs et 9 cours administratives d’appel réparties sur l’ensemble du territoire national. Cette architecture judiciaire complexe soulève des interrogations sur sa capacité réelle à garantir un accès équitable à la justice administrative dans toutes les provinces du pays.
Composée de neuf membres, cette institution fait face à des défis considérables dans un contexte où les litiges administratifs connaissent une croissance exponentielle. La rentrée judiciaire 2025 s’annonce donc comme une année charnière pour la consolidation de l’État de droit en RDC, où la qualité du contentieux administratif congolais sera scrutée à la loupe par l’ensemble des observateurs de la vie judiciaire nationale et internationale.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
