Les fissures béantes s’étendent comme des cicatrices à travers les artères du quartier Ngomba Kikusa. Marine, Maluti, Sonabata… Ces noms d’avenues résonnent désormais comme une litanie du désastre. Sept têtes d’érosion transforment progressivement ce secteur de la commune de Ngaliema en paysage lunaire, menaçant directement la vie de milliers de Kinois.
« Nous dormons avec un œil ouvert », confie Mama Sophie, habitante de l’avenue Kipemba depuis quinze ans. « La nuit, nous entendons la terre qui craque, qui s’effondre. Chaque pluie devient une malédiction. » Comme elle, des centaines de familles vivent dans l’angoisse permanente, leurs maisons suspendues au bord de gouffres pouvant atteindre 40 mètres de profondeur.
Face à l’urgence, le ministre des Infrastructures et Travaux publics a dépêché une mission conjointe ce mardi 11 janvier. L’objectif ? Évaluer l’ampleur des dégâts et identifier les ménages nécessitant une relocalisation immédiate. Mais comment en est-on arrivé à cette situation critique ? Les travaux antiérosifs suffiront-ils à sauver ce quartier en péril ?
Kevin Babaka Lelo, directeur de projet à l’Agence congolaise des Grands travaux (ACGT), ne cache pas son inquiétude. « Ce sont des sillons érosifs importants qui s’étendent sur des longueurs significatives. La situation est extrêmement préoccupante, une menace directe pour la population et pour l’habitat. » Son agence, forte de son expertise en matière de lutte contre l’érosion, dispose déjà des paramètres nécessaires pour une évaluation objective.
Derrière les termes techniques se cache une réalité humaine dramatique. Les dégâts érosion à Ngaliema ne sont pas que des chiffres ou des mesures topographiques. Ce sont des vies bouleversées, des économies familiales anéanties, un tissu social qui se déchire. Les artères Bikela 1 et 2, jadis animées, ressemblent aujourd’hui à des zones de guerre naturelle.
La réponse gouvernementale s’organise cependant. Un rapport sommaire sera rapidement présenté au ministre John Banza Lunda pour mobiliser les ressources indispensables. Mais le temps presse, et la saison des pluies ne fait qu’aggraver la situation. Les travaux antiérosifs annoncés représenteront-ils une solution durable ou un simple pansement sur une jambe de bois ?
Cette crise de l’érosion à Kinshasa pose des questions fondamentales sur l’urbanisation galopante de la capitale et la gestion des risques environnementaux. Ngomba Kikusa n’est malheureusement pas un cas isolé. Combien d’autres quartiers vivent ainsi au bord du précipice, littéralement et figurativement ?
La mission de l’ACGT devra non seulement proposer des solutions techniques immédiates, mais aussi envisager des stratégies de prévention à long terme. Car au-delà des dégâts matériels, c’est la confiance des populations dans les institutions qui est en jeu. Les habitants de Ngomba Kikusa attendent plus que des promesses : ils réclament des actions concrètes pour sauver leurs foyers et leur dignité.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
