Dans une capitale congolaise où l’insalubrité est devenue le décor quotidien de millions d’habitants, le gouverneur Daniel Bumba Lubaki a finalement décidé de passer à l’action. Ce samedi 8 novembre marque le lancement officiel d’une opération assainissement Kinshasa d’urgence qui soulève autant d’espoirs que de questions sur sa pérennité. Le programme « Kinshasa Ezo Bonga » peut-il véritablement transformer durablement le cadre de vie des Kinois ou s’agit-il d’une énième opération cosmétique ?
Accompagné de son vice-gouverneur Eddy Iyeli Molangi et soutenu par un impressionnant dispositif sécuritaire incluant la Légion nationale d’intervention et la 14ᵉ région militaire, Daniel Bumba a personnellement supervisé le démarrage des travaux sur le boulevard Lumumba, à l’entrée Mikondo. La présence des services techniques spécialisés – BSP/BESK et RASKIN – témoigne d’une approche institutionnelle qui contraste avec les initiatives éparses des années précédentes. Mais cette opération assainissement Kinshasa suffira-t-elle à venir à bout des montagnes de déchets qui obstruent les principales artères de la ville ?
L’embellissement capitale constitue l’un des axes majeurs de cette offensive urbaine. Le gouverneur a immédiatement donné le ton en se rendant au marché de la Liberté dans la commune de Masina, où il a ordonné la démolition de constructions anarchiques érigées dans un espace réservé au garage. Cette démonstration de force traduit-elle une réelle volonté politique de rétablir l’ordre urbain ou simplement un coup d’éclat médiatique ? La question mérite d’être posée tant les précédentes tentatives se sont heurtées à la résistance des habitudes et des intérêts établis.
La première phase de cette opération assainissement Kinshasa cible stratégiquement les principaux axes reliant l’aéroport de N’Djili à Kintambo magasin. Le boulevard Lumumba, l’avenue Sendwe, le boulevard Triomphal, l’avenue de la Libération et le boulevard du 30 Juin – qualifiés de « colonne vertébrale » de la ville – bénéficieront d’actions prioritaires incluant l’évacuation des déchets, l’éradication des marchés et garages pirates, le curage des voies d’évacuation et l’installation de bacs à ordures. Cette concentration sur les artères visibles aux visiteurs et diplomates interroge sur les priorités réelles du gouvernorat.
Le programme « Kinshasa Ezo Bonga » s’inscrit dans la continuité de la campagne « Balabala eza wenze te » menée ces derniers mois pour sensibiliser la population. Mais la réussite d’une telle entreprise dépendra crucialement de l’implication effective des bourgmestres que Daniel Bumba a solennellement appelés à s’engager. La constitution d’une task force dédiée et l’annonce d’une première évaluation dès mardi 11 novembre démontrent une certaine urgence dans l’exécution. Reste à savoir si cette mobilisation institutionnelle saura résister aux pesanteurs administratives et aux réalités budgétaires.
L’enjeu dépasse la simple embellissement capitale. Il s’agit ni plus ni moins de redéfinir le rapport des Kinois à leur espace public et de restaurer une culture civique érodée par des décennies de laisser-aller. Le gouverneur Bumba joue manifestement gros sur ce dossier, dont l’échec pourrait durablement fragiliser sa crédibilité politique. La réussite de cette opération assainissement Kinshasa conditionnera certainement l’avenir de son mandat et, plus largement, la perception internationale de la capacité des autorités congolaises à gérer leurs centres urbains.
Alors que les premiers engins s’activent sur le boulevard Lumumba, la véritable question demeure : cette offensive contre l’insalubrité constituera-t-elle le tournant décisif dans la transformation de Kinshasa ou simplement un feu de paille dans l’interminable combat pour l’assainissement de la capitale ? La réponse se jouera moins dans les déclarations d’intention que dans la persistance des efforts bien au-delà de cette phase médiatique initiale.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
