Le paysage minier congolais pourrait connaître une transformation radicale avec l’initiative législative du député Thierry Mulumba Mpandanjila. Ce mercredi 29 octobre, l’élu de Demba a déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale une proposition de loi cadre qui vise à restructurer fondamentalement l’approche congolaise de la valorisation de ses ressources minérales. Une manœuvre politique qui pourrait bien redéfinir les équilibres économiques du pays, ou au contraire, révéler les limites structurelles de l’État face aux géants miniers.
La proposition de Thierry Mulumba s’attaque frontalement à ce qu’il qualifie de « vide juridique béant » dans le dispositif législatif congolais. Alors que le Code minier actuel régit principalement les phases d’exploration, d’acquisition de droits miniers, d’extraction et de concentration – représentant seulement 15% du marché mondial des substances minérales – cette nouvelle initiative entend capturer les 85% restants en encadrant les activités industrielles post-extractives. Une ambition qui, si elle se concrétise, pourrait modifier durablement la place de la RDC dans l’échiquier minier international.
« Le Code minier prévoit, notamment dans ses articles 82 et 108, que la transformation des substances minérales doit être régie par une législation spécifique. C’est ce que nous proposons aujourd’hui », a expliqué le parlementaire. Cette référence précise aux dispositions existantes démontre une stratégie législative réfléchie, visant à s’inscrire dans la continuité du cadre juridique tout en comblant ses lacunes. Mais la question qui se pose est celle de la capacité réelle de l’État à mettre en œuvre une telle révolution industrielle.
La transformation minière en RDC représente un enjeu économique colossal. Alors que le pays exporte massivement des minerais bruts, cette proposition de loi sur la chaîne de valeur minérale entend inverser la tendance en favorisant l’industrialisation locale. Thierry Mulumba défend sa vision avec conviction : « L’application de cette loi aura un impact significatif sur l’économie nationale et sera bénéfique pour la population, qui pourra en tirer des dividendes concrets. » Une promesse séduisante, mais qui soulève immédiatement des interrogations sur les modalités pratiques de sa mise en œuvre.
L’initiative du député du Kasaï-Central s’inscrit dans un contexte plus large de réflexion sur le modèle de développement congolais. Comment expliquer que la RDC, dotée de ressources minérales parmi les plus importantes au monde, peine toujours à transformer cette richesse potentielle en développement tangible pour sa population ? La proposition de Thierry Mulumba tente d’apporter une réponse législative à cette interrogation fondamentale, mais son adoption et sa mise en application réelle constitueront le véritable test de sa pertinence.
Les implications de cette loi cadre sur la transformation locale des substances minérales pourraient s’avérer considérables. En développant une chaîne de valeur minérale complète sur le territoire national, la RDC pourrait non seulement augmenter significativement ses revenus, mais aussi créer des emplois qualifiés et stimuler l’innovation technologique. Cependant, le défi infrastructurel, la nécessité de formation de main-d’œuvre spécialisée et la résistance potentielle des acteurs miniers habitués à l’exportation de matières premières brutes représentent autant d’obstacles à surmonter.
La stratégie politique derrière cette initiative mérite également analyse. Thierry Mulumba positionne-t-il cette proposition comme un instrument de valorisation personnelle ou comme une contribution sincère au débat national sur l’industrialisation ? Dans un paysage politique congolais souvent marqué par les calculs électoralistes, cette initiative législative sur la transformation minière en RDC pourrait constituer un marqueur important de l’engagement des parlementaires sur les questions de développement économique structurel.
La suite du processus législative s’annonce déterminante. La proposition devra maintenant naviguer à travers les commissions parlementaires, les éventuelles résistances des lobbies miniers et les arbitrages gouvernementaux. Son adoption éventuelle, puis sa mise en œuvre effective, constitueront un test crucial pour la capacité du système politique congolais à impulser des réformes structurelles ambitieuses. L’industrialisation par la valorisation locale des ressources minières, si souvent promise, trouvera-t-elle enfin un cadre législatif adapté ? La réponse à cette question pourrait bien définir le futur économique de la RDC pour les décennies à venir.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
