Le forum minier Lubumbashi s’est ouvert dans un contexte de remise en question profonde du modèle de développement minier congolais. Pendant trois jours, experts, société civile et représentants des communautés locales ont planché sur la redéfinition complète de la gouvernance minière RDC, avec une exigence centrale : transformer l’exploitation des ressources en véritable levier de développement pour la population.
Claude Kabemba, directeur exécutif de l’ONG SARW, a dressé un bilan sans concession des impacts socio-économiques mines actuels. « Les communautés vivant à proximité des sites miniers subissent des conséquences dramatiques : pollution environnementale, inégalités sociales croissantes, pauvreté endémique et manque criant d’accès aux services de base » a-t-il dénoncé. Le paradoxe est frappant : comment expliquer que les régions les plus riches en minerais soient souvent celles où les indicateurs de développement humain sont les plus faibles ?
La neuvième édition de l’Alternance Mining Indaba se positionne comme un espace de rupture avec les pratiques traditionnelles. « Notre pays ne peut plus se contenter d’être une simple plateforme d’extraction au service des économies étrangères » a martelé Kabemba. Cette édition historique marque un tournant dans l’approche congolaise des ressources minières Congo, avec une participation sans précédent des acteurs locaux.
La représentante de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) a proposé un cadre opérationnel pour une gestion plus vertueuse. « L’instauration d’une gouvernance locale participative est la clé du succès » a-t-elle affirmé. Son intervention a souligné l’impérative nécessité de mettre en place des mécanismes de traçabilité robustes et des systèmes de redevabilité transparents. Où vont précisément nos minerais ? Qui en bénéficie réellement ? Comment garantir que les revenus miniers soient réinvestis dans le développement local ? Autant de questions qui appellent des réponses concrètes.
Les travaux de ce forum s’articulent autour d’un thème particulièrement pertinent : « Minerais stratégiques de la RDC : enjeux géopolitiques mondiaux et impacts socio-économiques locaux ». Cette formulation traduit une prise de conscience collective : la valeur stratégique des minerais congolais sur la scène internationale doit se traduire par des retombées tangibles pour les populations riveraines. Le défi est de taille alors que la demande mondiale en minerais critiques ne cesse de croître.
L’Alternance Mining Indaba représente bien plus qu’une simple conférence technique. C’est un laboratoire d’idées où s’élabore le futur modèle minier congolais. Les recommandations qui émergeront de ces assises pourraient influencer durablement les politiques minières nationales. La participation active des communautés locales, traditionnellement exclues des processus décisionnels, constitue une innovation majeure dans le paysage minier africain.
Quelles transformations concrètes peut-on attendre de ce forum ? La refonte des mécanismes de redistribution des revenus miniers, l’encadrement plus strict des obligations sociales des entreprises, et la mise en place de dispositifs de contrôle indépendants figurent parmi les priorités discutées. La réussite de cette transition vers une gouvernance minière RDC plus équitable dépendra de la capacité des parties prenantes à transformer les engagements en actions mesurables.
Alors que le secteur minier représente près de 30% du PIB de la RDC et plus de 95% de ses exportations, la refonte de sa gouvernance n’est pas seulement une question éthique, mais un impératif économique stratégique. Les décisions prises aujourd’hui à Lubumbashi dessineront le visage économique et social de la République Démocratique du Congo pour les décennies à venir. La mobilisation exceptionnelle autour de ce forum minier Lubumbashi démontre que la prise de conscience est désormais générale : l’ère du « business as usual » dans le secteur minier congolais est révolue.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
